Film réalisé par l'artiste, présentant un succession de scènes en plan fixe apparaissant à travers les lettres de mots découpés sur un fond noir, attribuant au mot la fonction de cadrage et reformulant le lien entre le langage et l'image.
Details présente une succession de scènes filmées en plan fixe, tantôt en noir et blanc, tantôt en couleur. Le spectateur est amené à en deviner le motif à travers un cache noir dans lequel est découpé un mot, différent à chaque scène : INSTEAD, BECOMING, CONTINUE, ALONE, UNKNOWN, ESTATIC, FORGOTTEN, EXPECT…
Le dessin des lettres creuse l'écran noir et laisse « entre percevoir » une scène filmée par l'artiste : caméra placée parallèlement à la route lors d'un déplacement en voiture, perpendiculairement au trafic dans une rue à New York, frontalement au mur du musée lors d'une installation de l'exposition de l'artiste…
A chaque scène suggérée correspond un mot. Si la relation entre la signification du mot et ce qui se joue à travers lui tient de l'association d'idée, celle-ci est purement arbitraire et fortuite.
Le rythme des apparitions est scandé par un écran noir et muet. Ce « noir » marque un arrêt avant l'ouverture d'une nouvelle scène et semble alors libérer le fond sonore qui l'habite. Aussi, le système opère un retour syncrétique sur le cinéma muet, en greffant le principe d'intertitre sur l'image filmée elle-même. Mais ici, le « carton », c'est-à-dire le mot, n'indique rien, ni sur ce qui se joue ni sur ce qui va se jouer, il est simplement superposé à l'image en mouvement.
Robert Barry attribue au mot la fonction de cadrage et reformule le lien entre le langage et l'image. Il semble ainsi prendre radicalement le contre-pied des propos de F.W. Murnau, selon qui « le film idéal n'aurait pas besoin de texte ».
Robert Barry (né 1936 à New York) appartient à la première génération des artistes conceptuels
avec
Lawrence Weiner,
Joseph Kosuth,
On Kawara, Douglas Huebler… En Europe, Robert
Barry a participé dès la fin des années 1960 à des expositions majeures d'
art conceptuel :
en 1969
Op losse schroeven à Amsterdam,
When Attitudes Become Form à Bern,
Konzeption à Leverkusen et
Prospect 69 à Dusseldörf.
Il a ensuite participé à la majeure partie des expositions conceptuelles et son travail fut
montré dans les expositions d'art contemporain internationales les plus importantes : la
Biennale de Paris en 1971, La Documenta à Kassel en 1972, la Biennale de Venise en 1972,
Contemporanea à Rome en 1973.
Parmi les artistes conceptuels qui travaillent plus particulièrement à partir du
langage, Robert
Barry occupe une place importante à la frontière de l'art visuel, de la poésie et de la
philosophie. L'art conceptuel est – bien plus qu'une révolution des formes visuelles de l'art
moderne – une repensée fondamentale de la fonction de l'art et des artistes dans un
contexte culturel changeant. C'est dans la définition de cette nouvelle appréhension de l'art
que les idées et les œuvres de Robert Barry apportent une contribution essentielle.
Après avoir examiné systématiquement plusieurs phénomènes physiques à partir de 1968
et de 1969, en expérimentant les champs électromagnétiques, les gaz inertes, les
fréquences électromagnétiques d'ultrasons (
Inert Gas Series, 1969), Robert Barry travaille
depuis plus de trente ans à partir de mots et de pensées, qu'il disperse ou projette de façon
très méthodique sur des supports et des surfaces différents : papier, toile, miroir, mur, sol…