les presses du réel
Claude Rutault -
Le musée national d'art moderne, le musée de Grenoble et le Consortium de Dijon se trouvaient tous les trois, et indépendamment, engagés avec Claude Rutault dans l'élaboration et la mise en place d'un projet d'exposition. Choisissant d'œuvrer ensemble, leurs responsables préfèrent la coïncidence à l'itinérance. La dimension d'ouverture du travail de peinture de Claude Rutault, ses dispositifs d'éclatement dans l'espace (l'espace de présentation comme l'espace géographique), les processus d'actualisation, de suivi ou de développement dans le temps, ne suggèreraient-ils pas un tel dispositif...
Et Rutault d'organiser la cohérence de l'ensemble avec le souci d'une diversité dont témoigne à l'évidence le catalogue commun aux trois manifestations : du général au particulier.
A Paris, dans les galeries contemporaines, Claude Rutault expose les postulats, principes et outils qui fondent son travail. Du premier d'entre eux (« une toile tendue sur châssis, peinte de la même couleur que le mur sur lequel elle est accrochée ») à la question du non-peint, de l'usage des piles et des papiers à la présence de la sculpture et de la photographie.
A Grenoble, Claude Rutault a choisi d'actualiser deux fois (et très différemment) les 7 mêmes « définitions/méthodes » : dans deux salles du musée, le passage d'un espace à l'autre impliquant de traverser une salle de peinture ancienne?
A Dijon, la définition/méthode n°180 à l'adresse 1 présentée dans l'ensemble des salles entraînera l'apparition ‘exceptionnelle) sur un mur matrice peint d'une couleur de toiles peintes d'autres couleurs.

Dominique Bozo (Président du Centre Georges Pompidou), Serge Lemoine (Directeur du Musée de Grenoble), François Orivel (Président du Coin du Miroir)
Claude Rutault (1941-2022) est un peintre conceptuel français dont l'ensemble de l'œuvre vise à une déconstruction générale des modes d'existence du tableau.
Claude Rutault ne réalise pas ses toiles lui-même, il ne les fait pas fabriquer dans son atelier, il ne supervise pas ses accrochages, il rédige par contre un ensemble de consignes, d'instructions et de recommandations appelées « définitions/méthodes ». Celles-ci sont méticuleusement suivies par un collectionneur, un musée ou une galerie qu'il appelle les « preneurs en charge » et qui s'attellent à les « actualiser ».
L'origine de sa réflexion naît en 1973, lors de la mise en peinture des murs de sa cuisine, pendant son aménagement dans sa nouvelle maison. Il repeint dans la foulée une des toiles qui s'y trouve pour la raccrocher ensuite. Depuis, il réfléchit et approfondit la portée de son acte. Sa première « dé-finitions/méthodes » (1973) porte le numéro 1 : toile à l'unité « une toile tendue sur châssis peinte de la même couleur que le mur sur lequel elle est accrochée. Sont utilisables tous les formats standards disponibles dans le commerce, qu'ils soient rectangulaires, carrés, ronds ou ovales. L'accrochage est traditionnel. »
Ses toiles ont une durée de vie limitée. En effet, si le « preneur en charge » vient à décider de la déplacer ou de repeindre le mur sur lequel elle est accrochée, il sera obligé d'en faire de même pour la toile et lui donnera par conséquence une nouvelle identité, il la « réactualise ». Les consignes des « définitions/méthodes » sont claires, courtes et simples. Leurs exécutions dépendent uniquement du « preneur en charge ». Leurs interprétations, le suivi des consignes, les formes, les couleurs, l'emplacement, le contexte, participent à l'absence de maîtrise que Rutault a sur elles. Ces paramètres sont imprévisibles, liés uniquement au « preneur en charge » et ne peuvent pas être anticipés. Si ses toiles évoluent de manière imprévue, le « preneur en charge » devra en avertir Rutault. Au fil de temps, il a dû accepter que ses toiles aient leurs propres chemins et leurs propres existences. Elles évoluent sans balises, sans contrôle de sa part. Ses « définitions/méthodes » ont décrit la naissance de centaines de toiles dont il n'est plus responsable au fil du temps qui passe.
Textes de Dominique Bozo, Xavier Douroux, Franck Gautherot, Serge Lemoine.
 
paru en 1992
édition française
23 x 27,5 cm
158 pages (43 ill. coul. & 45 ill. n&b)
 
34.00 17.00
(offre spéciale)
 
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