Comment une construction architecturale héritée du colonialisme et mise au service du pouvoir autoritaire est devenue le lieu de sa chute : les « révolutions de ronds-points », de la Corée du Sud au Printemps arabe.
La majorité des récentes révolutions et révoltes de par le monde on possédé une caractéristique architecturale commune : beaucoup ont éclaté sur les ronds-points des centres-villes. En pensant la relation entre protestation et forme urbaine, Eyal Weizman se propose d'analyser l'histoire des « révolutions de ronds-points », depuis le soulèvement de mai 1980 à Gwangju, Corée du Sud, jusqu'au Printemps arabe et ses conséquences chaotiques. Ce court texte suit le développement du rond-point en Europe et en Amérique du Nord au début du XXe siècle, puis son exportation vers le monde colonial dans le cadre de tentatives de « discipliner » et « policer » les villes non-occidentales. Aujourd'hui, la vague de révolte qui a caractérisé le Printemps arabe semble refluer, alors que les nations et les peuples subissent la guerre civile et l'oppression militaire. Pour faire face à cette contre-révolution, la puissance immanente des acteurs des « révolutions de ronds-points » devra trouver son corollaire dans les « tables rondes », nouveau lieu possible du changement politique.
Avec des photographies de Kyungsub Shin.
Publié suite à la collaboration d'Eyal Weizman à l'exposition Gwangju Folly II en 2013.
Eyal Weizman (né en 1970 à Haifa) est un intellectuel et architecte israélien. Il est cofondateur et directeur du projet Forensic Architecture et enseigne les cultures spatiales et visuelles à Goldsmiths, Université de Londres, où il dirige le Centre for Research Architecture. Forensic Architecture, actif notamment dans les procès pour crimes de guerre, développe des pratiques d'investigation qui utilisent des techniques et des technologies architecturales pour enquêter sur les cas de violence d'État. Eyal Weizman est l'auteur de nombreux livres, dont À travers les murs. L'architecture de la nouvelle guerre urbaine (La Fabrique, 2008) et La vérité en ruines. Manifeste pour une architecture forensique (Zones, 2021). Weizman est également membre fondateur du collectif Decolonizing Architecture Art Residency (DAAR) à Bethléem (Palestine), du Comité consultatif scientifique de la Cour Pénale Internationale et du Centre for Investigative Journalism.