Resynthese FAVN (coffret 10 CD + 3 livrets)

Présentées pour la première fois à la Kunsthalle Wien dans l'exposition « Halluzination, Perspektive, Synthese », et développant des idées présentées initialement dans le cadre du projet FAVN de 2016, les dix œuvres qui composent Resynthese FAVN présentent des itérations de timbres synthétiques produites à l'aide « d'opérateurs spectraux, se déplaçant entre l'analyse et la synthèse, entre les modèles discriminatifs et génératifs, afin de rendre audible leur signature d'intelligence, la trace du signal de leur oreille cérébrale non humaine » – une sonification d'une machine prise en flagrant délit d'écoute d'elle-même. L'audio est accompagné de trois livrets contenant trois nouveaux essais qui offrent une contextualisation critique et historique à l'œuvre, édités en collaboration avec l'éditeur britannique Urbanomic.
FAVN et sa resynthèse renvoient au poème « Prélude à l'Après-midi d'un faune » de Stéphane Mallarmé (1876) et à ses interprétations musicales et chorégraphiques par Claude Debussy et Vaslav Nijinsky. Un faune, entre rêverie et réalité, raconte une rencontre sensuelle avec plusieurs nymphes. Il n'est pas certain que l'expérience ait été une illusion ; le faune demande : « Ai-je aimé un rêve ? ». Hecker, à son tour, demande aux auditeurs d'examiner leurs propres perceptions sensorielles. Quelles formes nos esprits humains donnent-ils aux timbres algorithmiques et aux voix synthétiques qui se déploient à travers les versions de Resynthese FAVN ? Les sons traînent, montent, résonnent, se déforment et grondent entre irrégularité obsessionnelle et logique formelle. Des différences indéniables mais indescriptibles apparaissent entre les dix pièces de 53 minutes. Le langage – qui émerge parfois par le biais d'une voix synthétique, tirée d'un livret écrit par Robin Mackay – s'avère instable dans les textures hallucinatoires libérées par la composition de Hecker. Alors que des formes chimériques se matérialisent et s'évanouissent, on peut se demander si l'on écoute le faune ou si l'on devient un faune en écoutant.
Dans les trois essais inédits, Quentin Meillassoux contextualise le personnage du faune dans le poème de Mallarmé, Noé Soulier évalue la traduction incarnée de l'« Après-midi d'un faune » dans le ballet de Nijinsky de 1912 ; et Han Han et Vincent Lostanlen examinent la trajectoire du timbre, depuis le siècle des Lumières jusqu'à notre présent informatique.