Comment, du milieu du XVIIIe siècle à nos jours, un point de vue scientifique émerge en matière d'origine des langues et des peuples / pourquoi et comment sur cette question se constituent des savoirs et des zones de non-savoir ? Le second des deux volumes constituant cette publication décrit la naissance de la linguistique en France comme discipline et traite, à partir d'un travail d'archives de première main, des enjeux idéologiques et politiques qui contribuent à cette mise en place.
Ce livre repose sur un travail d'archives qui apporte un éclairage inédit sur la rénovation de l'Université française. Elle est initiée vers le milieu du XIXe siècle grâce à l'action menée par quelques bibliothécaires parisiens et quelques professeurs de l'École normale supérieure. Elle est ensuite liée au destin de Michel Bréal, de la rue d'Ulm (1852) au Collège de France (1864) puis à la création à Paris de l'École des Hautes-Études (1866) avec l'historien Gabriel Monod et le médiéviste Gaston Paris.
Michel Bréal y implante l'étude positiviste de l'histoire des religions et des langues, la philologie et la linguistique comme discipline à part entière. En retenant en 1881 le plus brillant linguiste de sa génération, le Suisse Ferdinand de Saussure, il consolide le rêve : les cours vont être fréquentés pendant une dizaine d'années par environ deux cents étudiants. Ceux sont eux qui, malgré les guerres et les décès prématurés, innerveront le monde littéraire et savant, en France et ailleurs, mais aussi l'enseignement secondaire et universitaire.