Première monographie : une chronologie commentée des expositions, résidences et commandes publiques de Laurent Faulon, avec un essai de Pascal Beausse.
Connu pour ses performances critiquant l'assujettissement du corps à
diverses sortes de disciplines (des techniques de pouvoir rendent les individus
d'autant plus obéissants qu'ils sont utiles et inversement), pour son
analyse de l'économie consumériste (dont les dispositifs visent à détourner
l'attention des sujets vers des marchandises) et pour ses machines désirantes
renversant la logique de cette économie (des objets ou des mécanismes
sont activés et singent nos comportements, nos fantasmes, mettant
en cause les lignes de partage entre le pur et l'impur), Laurent Faulon n'est
pas un artiste au parcours normé. Son œuvre ne peut se résumer à une liste
d'expositions dans des lieux qui la légitimeraient – l'artiste légitimant en
retour les structures qui l'accueillent ou l'invitent.
C'est ce que révèle le présent ouvrage, qui consiste en une chronologie
commentée des expositions, résidences et commandes publiques
de Laurent Faulon. L'une des caractéristiques de cet inventaire est qu'il
témoigne d'une activité qui déborde le cadre de l'institution. C'est la raison
pour laquelle il intervient, souvent en compagnie d'autres artistes – pour
rompre avec toute logique concurrentielle –, dans des espaces interstitiels.
L'art n'est pas selon lui un accessoire luxueux proposé à un public acquis
à sa cause, mais plutôt ce qui se construit lors de sa production, lors du
temps passé à investir un lieu, rencontrer ses habitants et parfois travailler
avec eux. Il est ainsi arrivé à Laurent Faulon de renouveler constamment
les œuvres présentées dans un même cadre, à l'encontre de l'idée de l'exposition
comme produit fini.
L'ensemble de ces choix influe sur la topographie et la temporalité
particulières de certains projets initiés dans des logements sociaux, des
chantiers de bâtiments en construction, un appartement communautaire,
etc., parfois situés dans des pays tels la Russie, l'Arménie, Macao ou le
Japon. Soit des contextes sans rapport avec le musée, le centre d'art ou la
galerie considérés comme des réceptacles valorisants, des endroits confortables
où il importerait, pour l'artiste, de se trouver. Les lieux qu'investit
Laurent Faulon sont chargés de significations politiques, sociales, économiques.
Ils constituent des environnements à chaque fois différents, qu'il
s'attache à révéler par des gestes forts, ce qu'il appelle des « occupations »
(l'art comme question et non comme réponse donnée dans un cadre préconditionné),
dont la conception est opposée à cette manière de challenge
sportif à quoi se résume fréquemment l'art dit in situ.
(Pierre Tillet)
Laurent Faulon (né en 1969 à Nevers, vit et travaille, avec Delphine Reist, à Genève) développe un
art d'interventions, le plus souvent éphémères et
fortement contextualisées. En une vingtaine d'années, son
travail s'est déplacé de la performance vers l'installation.
Concevant toujours des œuvres qui entrent en résonance avec
les caractéristiques architecturales, politiques,
économiques ou sociales de l'endroit qui les accueille, c'est
souvent ce dernier qui constitue le point de départ de sa
réflexion et reste l'élément principal de ses
propositions.