Le deuxième album de Tsé (Guillaume Ollendorff).
Il y a quelques années que Tsé s'était tu. Quelques années entre un premier album pétri de dub électronique lignée Rhythm & Sound (
Ghost dub, paru sur Opulsion Records) et ce
La Ralentie, au titre inspiré par un poème d'
Henri Michaux. Quelques années où Guillaume Ollendorf, de son vrai nom, a papillonné aux côtés de Colder, puis entre Paris et Berlin où il séjourne désormais, se consacrant également à un projet duo, sorte de version pop et digistep de
Suicide, baptisé
Dust and Chimes. Quelques années, surtout, que ce musicien aux horizons musicaux si diffus a mis à profit pour concocter un album éminemment personnel et dense, où derrière des lignes musicales ambivalentes, à la fois ouatées et tendues, percent l'irradiation d'influences latentes. Celle de Berlin, sa nouvelle ville, qui se creuse dans cette musique électronique de chambre, aux climats post-ambient méditatifs, sobres, et louvoyant entre guitares saturées et gravas digitaux épars (
Car song). Celle d'une ville qui transparaît dans les textes détournés du
Negative nein de Einstürzende Neubauten et qui se devine encore dans l'impression de fin de cycle emprunté au noir
Kaputt de l'écrivain fasciste puis anti-fasciste Curzio Malaparte dans le titre introductif. Ni désabusé, ni enthousiaste, Tsé est le témoin privilégié de sa propre existence, et ce disque témoigne de ce constat. La voix y est très présente, fragmentée, centrale (comme sur
Motto), posée avec ce détachement soigné et elliptique très cold-wave. Les influences dub sont encore là (
Hübsche muzik,
Such a thing), mais les climats sonores sont désormais plus distillés, plus profonds, se rapprochant davantage des climats les plus électroniques et spatialisés de
Coil notamment (
La ralentie,
Peculiar noise loop). Un disque sur lequel on aime revenir, comme un livre de chevet posé au plus près de son intimité manifeste.
Laurent Catala,
Octopus