La caméra longe la façade d'un entrepôt et marque une pause devant chaque ouverture close produisant ainsi une série de « tableaux » qui scandent des prises de vues sur la ville, son organisation et ses flux.
Les films de Peter Downsbrough constituent une partie encore peu connue de son travail. La figure humaine y disparaît peu à peu au profit de la représentation de la ville et de ses flux. Ainsi, les structures architecturale, circulatoire, marchande et fonctionnelle de la ville se donnent à lire avec détermination. Cependant, ces films ne relèvent pas pour autant du documentaire : ce sont des images en mouvement ayant le mouvement pour principal sujet. « Il est possible – écrit
Michel Gauthier – de trouver dans la plupart des films des échos aux œuvres employant tubes et rubans adhésifs. […] De telles œuvres, malgré leur géométrisme et le minimalisme de leurs moyens plastiques, ont pour principale caractéristique de ne pas assigner leur public à la fixité d'une place. Elles récusent la manœuvre focalisatrice. […] L'inclination profonde de l'artiste pour le film s'éclaire. Travellings, variation des angles de vue, ces techniques de base de l'art filmique sont tout simplement celles qu'attendent de nous les œuvres que, depuis les années 1980, Peter Downsbrough agence dans l'espace, en paradoxal et singulier constructiviste déhiérarchiseur qu'il est ». (
Michel Gauthier, « La fabrique du passage », in cat.
Peter Downsbrough. ET/C, Frac Bourgogne, Dijon, 2005, p. 16)
Figure majeure de l'art contemporain, Peter Downsbrough (1940-2024) a opéré depuis le début des années 1970 dans le sillage du
minimalisme, au croisement de l'
art conceptuel et de l'
art concret. Ses nombreuses pratiques artistiques –
sculpture,
photographie, commande publique,
livres,
films,
pièces sonores, appliquées, lors d'interventions discrètes, à l'espace urbain – sont fondées sur la notion de position et de cadrage, et interrogent le rapport à l'espace et le langage. Artiste de la simplicité et du dénuement, il structurait l'espace en créant des volumes discrets mais clairement visibles à l'aide d'un vocabulaire plastique épuré, constitué de figures géométriques simples, de lignes, de mots ainsi que de surfaces peintes. La combinaison des éléments
linguistiques et
géométriques formalise ainsi des espaces structurés induisant une multiplicité de lectures.