La troisième collaboration entre Félicia Atkinson et Jefre Cantu-Ledesma – leur premier album réalisé ensemble dans le même studio :
un dialogue électroacoustique, poétique, fluide et sensible entre les deux expérimentateurs.
Dès ses premiers balbutiements, la musique expérimentale s'est montrée particulièrement propice à la collaboration transnationale et interculturelle. Cherchant la réponse à un problème fondamental – comment transcender les frontières de la différence, de la distance et du temps – elle offre un moyen de trouver un terrain d'entente et de communiquer à travers la forme élémentaire du son. Au cours des cinq dernières années, c'est précisément ce que le duo Félicia Atkinson & Jefre Cantu-Ledesma a réalisé, en entrelaçant des sonorités extraordinaires à travers la distance géographique entre la France et les États-Unis. Leur troisième album pour Shelter Press, « Un hiver en plein été » – le premier à avoir été enregistré en grande partie par Atkinson et Cantu-Ledesma dans le même espace –, distille une palette envoûtante de sources acoustiques et électroniques dans un discours ouvert et radicalement poétique, offrant une touche de chaleur et d'intimité dans le monde post-covid à venir.
Tous deux expérimentateurs chevronnés, avec des travaux solos célèbres à leur actif – chacun relevant les défis de la pratique électroacoustique à sa manière – avant leur première sortie enregistrée en 2016, Félicia Atkinson et Jefre Cantu-Ledesma ne s'étaient croisés qu'une seule fois en personne, lors d'une première rencontre à San Fransisco en 2009. Le lien mutuel qui s'est formé lors de cette brève rencontre a donné naissance à leur premier album, «
Comme Un Seul Narcisse », suivi deux ans plus tard de «
Limpid As The Solitudes » en 2018. Tous deux enregistrés à distance, par l'envoi de fichiers dans les deux sens, enrichis par des conversations sur un large éventail de sujets, ces deux albums ont été guidés par des clins d'œil conceptuels passionnés à Guy Debord, Baudelaire,
Brion Gysin et Sylvia Plath, tout en cherchant des solutions aux défis et aux possibilités uniques que le travail à distance provoque.
Là où les succès des albums précédents tiennent au rapprochement de moments disparates et d'espaces divergents, « Un hiver en plein été » culmine comme une célébration de la proximité, résultat du travail d'Atkinson et de Cantu-Ledesma en studio, de manière réactive et en temps réel, pour la première fois. Enregistré à Brooklyn en août 2019, quelques mois avant que la pandémie n'impose des distances abyssales à travers le monde, ces six pièces discrètes, soigneusement élaborées et finalisées au cours de l'année suivante, évoluent de manière fluide sur les deux faces de l'album, tissant une tentaculaire palette de sonorités, au sein de laquelle les deux artistes conservent leurs propres voix et visions, tout en s'entraînant mutuellement vers des terrains inexplorés.
Atkinson compare l'enregistrement d'« Un hiver en plein été » à un « terrain de jeu », chaque artiste étant « avide de chaque son, un peu comme la ruée vers le Louvre dans
Bande à part de
Godard », ce à quoi Cantu-Ledesma ajoute que le processus semble avoir eu « un esprit propre », les deux artistes étant « embarqués ». Ce sentiment organique d'entropie et d'enthousiasme – une exploration joyeuse de l'inconnu – guide l'évolution de l'ensemble de l'album.
Composé à partir d'éléments mélodiques déconstruits et de longues dérives tonales – avec de subtils clins d'œil aux ragas classiques indiens et au free jazz –, intégrant des voix parlées, des textures sonores capturées dans le studio et dans le monde extérieur, et des interventions tonales et percussives, « Un hiver en plein été
» se présente comme une série de dialogues électroacoustiques aux multiples facettes, entre deux artistes travaillant à la jonction de l'abstraction et de la narration, de l'enregistrement de terrain et de l'harmonie, de la philosophie et de la phénoménologie, à la recherche de la signification de l'amitié et de sa manifestation dans le son pur.
Musicienne, artiste sonore et visuelle, Félicia Atkinson est née en 1981 à Paris et vit sur la côte sauvage de la Normandie. Elle compose de la musique depuis le début des années 2000. Elle a sorti de nombreux disques et un roman sur
Shelter Press, le label et éditeur qu'elle co-dirige avec Bartolomé Sanson.
Pour Félicia Atkinson, les voix humaines habitent une certaine écologie à côté et au sein de bien d'autres choses qui ne parlent pas : paysages, images, livres, souvenirs, idées...
La compositrice électroacoustique et artiste visuelle française crée des œuvres plastiques et sonores qui animent ces autres voix possibles en conversation avec la sienne, en associant des enregistrements de terrain, des instruments MIDI et des extraits poétiques en français et en anglais, des installations en tissus, du dessins sur papier et toile, des sculptures en argile. Félicia Atkinson utilise la composition musicale et l'installation plastique comme un moyen de traiter la vie imaginative et créative en créant une sorte d'atelier-monde, chez elle et dans les paysages qu'elle traverse. Ainsi, ses compositions en strates énonces des histoires abstraites qui s'étirent et plient alternativement le temps et l'espace, dont l'artiste peut être la narratrice sans en être forcement la protagoniste.
Félicia Atkinson a collaboré avec des musiciens tels que
Jefre Cantu-Ledesma, Chris Watson, Christina Vantzou et
Stephen O'Malley, ainsi qu'avec des ensembles tels que Eeklekto (Genève) et Neon (Oslo). Elle s'est produite dans des salles et festivals tels que INA GRM/Maison de la Radio et la Philharmonie (Paris), Issue Project Room (NYC), le Barbican Center (Londres), Le Guess Who (Utrecht), Sonic Acts (Amsteerdam), Atonal (Berlin), Henie Onstad (Oslo), Unsound (Cracovie) et Skanu Mesz (Riga)... Son travail a été commandé par des cinéastes (
Ben Rivers, Chivas de Vinck) et des maisons de couture (Prada, Burberry). Elle a exposé dans des musées, des galeries et des biennales, notamment la Biennale RIBOCA (Riga), Overgaden (Copenhague), BOZAR (Bruxelles), La Criée (Rennes) , Kunsthaus Bethanien Kreuzberg (Berlin), l'Espace Paul Ricard (Paris) et MUCA ROMA (Mexico).
Multi-instrumentiste, fondateur du label Root Strata, membre fondateur du groupe Tarentel et membre de nombreuses autres formations (The Holy See, The Alps, Moholy-Nagy, Isidore Ducasse, Josephine, Raum), Jefre Cantu-Ledesma vit et travaille à San Francisco.