PARISONIC, UNE EXPOSITION MAGNETIC TRACES, UN SALON D'ECOUTE
Philippe F. Roux
(p. 4-5)
L'ouverture de l'art au son pour lui-même, hors d'une relation
à la musique, entraîne une reconsidération des formes
historiques et amène à repenser le mode d'apparition de l'art,
l'espace d'exposition et l'exposition elle-même.
Le son est matériau de sculptures, installations, projections, il est
outil plastique et véhicule d'idées. Il est un espace-temps
qui se déploie dans des espaces et des temps.
Le son projeté dans l'espace est déterminé par le lieu
: acoustique, espace extérieur ou fermé, matériaux et
dimensions, réverbération... Le son se trouve confronté
aux sons ambiants, à la présence du corps des visiteurs, aux
autres œuvres. Sur la « neutralité » du White Cube
prévaut alors la réponse acoustique de l'espace.
Parisonic
Hear & Now présente les œuvres en
co-présence. Dans l'espace d'exposition, les sons des pièces
forment par endroit une nuée, une tonalité
générale qui pourrait être celle de l'exposition. A
proximité des œuvres, les sons créent « l'espace
individuel » nécessaire à leur appréhension.
Dans l'exposition, le salon d'écoute Magnetic Traces propose un autre
mode d'apparition. Entre diffusion électroacoustique musicale et
projection sonore, les pièces sonores sur support mettent en
œuvre leur propre espace acoustique et les espaces enregistrés
(désert, appartement, rues...).
Les vingt-six artistes de Parisonic
Hear & Now
présentent des œuvres qui, des espaces australiens à
l'espace d'exposition, des profondeurs des flux sonores aux surfaces de
l'architecture ou du son lui-même, envisagent le lieu comme leur
sujet, leur réceptacle et leur révélateur.
Eric la Casa,
Philip Samartzis et moi-même avons choisi des artistes
émergents et confirmés, Australiens et Français, pour
une exposition qui présente des œuvres plastiques acousmatiques
dans le Salon d'Ecoutes Magnetic Traces et des œuvres plastiques,
sculptures, installations, dessins dans la nef de l'ancienne Brasserie
Bouchoule...
Pour approfondir l'approche du travail des artistes, nous avons
imaginé un mode d'entretien original, les artistes parlant de leur
travail par le jeu d'une question qu'ils aimeraient se voir poser ensuite
adressée à chacun des artistes de Parisonic.
Je dois dire ici que ma rencontre avec
Max Neuhaus en 1997 a
déterminé mon engagement personnel dans la création de
Purepresence et de Parisonic. Son approche du son en relation avec l'espace
se devait d'être évoquée lors de cette édition
Hear
& Now de Parisonic. Ainsi, un hommage lui est rendu par la
présentation des dessins de l'installation
Three to one
(Kassel) à l'entrée de l'exposition.
Le présent ouvrage se veut une extension de Parisonic et un outil de
réflexion sur les pratiques plastiques sonores actuelles.
LE QUESTIONNAIRE :
Comment investissez vous la question du rapport entre le son et l'espace de
diffusion dans le travail que vous présentez à Parisonic ?
Qu'est-ce que l'espace et l'environnement signifient pour des
instrumentistes ?
Les espaces que je sonde sont-ils intérieurs ? Les échos que
je capte sont-ils ceux des cris et des luttes ?
Comment faites-vous le lien, s'il y en a un, entre toutes vos pratiques du
sonore ?
En composant pour cette edition de Parisonic, quelles sont les principaux
défis auxquels vous avez fait face en présentant votre travail
dans un lieu inconnu ?
Qu'est que ce que les cercles signifient pour vous ?
Une question larsen : « Quelle question aimerais-tu qu'on te pose sur
ton travail ? ».
Peut-on dire quelque chose de son propre travail ?
Le lieu où appraît ton travail le détermine-t-il ?
Quels sont les paramètres que tu prends en compte lorsque tu
découvres un lieu dans lequel tu es invité à intervenir
?
Comme le constate
Augustin Berque à partir du Japon : « Vous ne
comprendrez jamais la réalité d'un certain milieu si vous
n'avez pas idée de la manière dont les sujets concernés
(les habitants de ce milieu) le perçoivent et le conçoivent.
» L'artiste œuvre-t-il selon les échelles/dimensions et
conditions locales (d'un espace donnée), ou ne fait-il qu'appliquer
ces propres règles (esthétiques) aux milieux dans lesquels il
intervient ?
Si tu fermes les yeux, qu'entends-tu?
Qu'englobes-tu dans la notion d'environnement sonore, et à partir de
ça, quelles limites t'imposes-tu dans ta manière d'aborder le
lieu ?
Quel est ton son favori et pourquoi ?
En quoi ma musique a quelque chose de politique ?
Quel type de relation as-tu avec « tes » sons,
c'est-à-dire avec les sons avec lesquels tu travaille ?
Comment travailles tu ?
Est qu'il est possible de communiquer sa propre expérience d'un lieu
par un « enregistrement sur le terrain » ?
Pourquoi cette articulation autour des lieux ?
Comment abordez-vous la question de l'écoute et de l'interaction du
public dans un travail in situ ? Et comment pensez-vous la
temporalité en relation avec l'espace ?
Horatio Vaggione postule la notion d'espace composable en tant qu'espace
opérationnel, qui se compose de l'ensemble des opérations et
variables à disposition de l'artiste dans l'acte créatif et de
composition. Quels sont les variables et les opérations que vous avez
pris en compte dans la création du travail qui vous présentez
pour cette édition de Parisonic ?