Un ouvrage collectif pour repenser un cosmopolitisme « mineur » et pluriel, débarrassé de son attache capitaliste, à travers
la mise en avant de traditions et pratiques alternatives du vivre-ensemble dans le monde.
Le cosmopolitisme est une théorie sur la façon de vivre ensemble. La première formulation du cosmopolitisme en Occident pourrait être datée du IVe siècle avant J.-C., dans la Grèce antique, par Diogène, qui se renvendiquait « citoyen du monde » (
kosmopolitês), une idée reprise plus tard par Emmanuel Kant dans le cadre du projet de « paix perpétuelle ».
Lorsque le cosmopolitisme est apparu pour la première fois comme une idée politique de la modernité au cours du siècle des Lumières en Europe, le projet embrassait les promesses libérales d'une économie mondialisée, tout en restant inconscient, voire complice, du capitalisme, de l'esclavage et du
colonialisme. Il était centré sur le sujet libéral masculin, bourgeois et blanc, sans tenir compte de la privation de droits, de la déshumanisation et de l'extermination des autres.
À l'aube du XXIe siècle, et dans le sillage de la
mondialisation effrenée, universitaires, politiciens et autres experts ont déclaré avec enthousiasme que le cosmopolitisme n'était plus seulement un idéal philosophique, mais un fait, l'idée de citoyen du monde dépassant la nation dans l'esprit et le ressenti des gens. Pendant ce temps, la crise
écologique mondiale s'aggrave, le fascisme revient sous différentes formes dans de nombreux endroits du monde, la répression des femmes, des minorités sexuelles, raciales, de classe et autres persiste à l'échelle mondiale ; la « crise des réfugiés » inonde le paysage médiatique et le spectacle politique. Il semble que peu des promesses cosmopolites soient restées. Mais c'est peut-être précisément pour cette raison qu'il semble absolument nécessaire pour les universitaires, les militants et les artistes d'aujourd'hui de faire face aux complexités et aux promesses que le cosmopolitisme a soulevées, bien qu'elles n'aient pas reçu de réponse adéquate. Qu'est-il arrivé à la promesse cosmopolite, et qui l'a trahie ?
Les « cosmopolitismes mineurs » remettent en question les prémisses sous-jacentes du « grand » cosmopolitisme sans pour autant renoncer au potentiel émancipateur non réalisé du concept dans son ensemble. Il s'agit de repenser les cosmopolitanismes au pluriel et de retracer les origines et les trajectoires multiples de la pensée cosmopolite à travers le monde. Considérant que les cosmopolitanismes émergent à travers des pratiques locales, historiques et politiques diverses et spécifiques, les cosmopolitanismes mineurs sont fondés sur la différence sans abandonner la quête d'une vision commune de convivialité et de justice. Ils cherchent à répondre à la question suivante : comment concilier nos différences et notre lutte commune ? Comment penser notre complicité avec ceux à qui nous résistons le plus ? Qui soutient l'épanouissement du monde malgré tout cela ?