En confrontant les œuvres récentes de l'artiste française à ses travaux plus anciens, ce catalogue rend compte d'une réflexion esthétique tournée vers le volume, la
sculpture, les matériaux bruts et l'Histoire. Les essais de Sophie Delpeux et Guitemie Maldonado introduisent un cahier central de reproductions en couleur, offrant ainsi un regard complet sur la pratique artistique de Sophie Dubosc.
En 2014, le Frac Normandie Rouen invitait Sophie Dubosc à concevoir une exposition personnelle dans son lieu. Sophie Dubosc développe depuis le milieu des années 2000 une réflexion singulière sur la pratique artistique dans ses liens complexes et parfois contrariés avec le legs
moderniste et, plus largement, avec l'histoire. L'exposition, pensée par l'artiste, cherchait notamment à mettre en avant les tensions qu'entretient l'artiste entre ses œuvres et la question du contexte qu'il soit esthétique, historique et social, lié au présent et ancré dans le passé.
Tourné avant tout vers le volume et la sculpture, le travail de Sophie Dubosc associe le plus souvent des formes et des matériaux hétérogènes à la forte présence physique comme la cendre, le plâtre, le chanvre, le tissu, le verre, le cheveu, le bois, l'encre… Leur prégnance génère des images, provoque des réminiscences qui renvoient à l'absence, l'altérité, la mémoire. À travers ses œuvres, Sophie Dubosc joue avec l'idée de matière mais aussi de culture, de projection, de perception et réinvestit le champ de la sculpture, du
surréalisme à l'
art minimal et
conceptuel en passant par l'
Arte Povera ou l'Anti-Form. Elle manie également les codes culturels, religieux, politiques et rejoue l'Histoire sollicitant ainsi notre mémoire individuelle et collective. Le titre de l'exposition, choisi en référence à une gravure de Goya issue de la série
Les Désastres de la guerre (1810-1820), offre une clé de lecture significative en ce sens. A travers ce titre, l'artiste convoque l'Histoire et, à partir de là, réinvestit la tension entre la raison et la folie, le rationnel et l'irrationnel. Ses œuvres, qui offrent des niveaux de réalité divers et parfois antinomiques éprouvent cette tension. Elles nous invitent à questionner les différentes formes de contradictions mais aussi de violence qu'induisent nos constructions culturelles et nos conditionnements.
Afin de prolonger l'exposition, le Frac a proposé à l'artiste d'étendre son propos en concevant un ouvrage qui, à partir de ce parcours, rende compte plus exhaustivement de l'étendue de sa pratique et de sa réflexion esthétique. Il en résulte un catalogue où les procédés de renvois et de tensions entres les œuvres, initiés dans l'espace d'exposition, s'appliquent à l'espace du livre et trouvent un prolongement dans les essais de Sophie Delpeux et Guitemie Maldonado consacrés au pouvoir d'empreinte de l'oeuvre de l'artiste, pour le premier, et à sa porté généalogique, pour le second qui s'attadre notamment sur les parallèles entre l'œuvre de l'artiste et les conceptions esthétiques de
René Magritte, Eva Hesse ou encore
Joachim Koester. L'ensemble tente un regard rétrospectif sur un corpus d'œuvres entrepris depuis une dizaine d'années.
Publié suite à l'exposition éponyme au Frac Haute-Normandie, Sotteville-lès-Rouen, du 17 mai au 27 juillet 2014.
Sophie Dubosc (née en 1974 à Paris, vit et travaille en Normandie) est diplômée de l'École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris (2002), de l'Université Paris-Sorbonne (Master en Histoire de l'art, 1998) et de l'École du Louvre (1997). Son travail a été présenté au Frac Normandie Rouen (« Avec ou sans raison », 2014), au
Palais de Tokyo (« Nouvelles Vagues », 2013), à la Fondation Ricard (« This and There », 2012), dans les galeries de l'ENSBA (« 2001-2011 : Soudain, déjà », 2011), ainsi que dans de nombreux centres d'art contemporains. Elle a bénéficié de résidences à la Fondation
Josef et
Anni Albers (Connecticut), au Centre Hospitalier Départemental Georges Daumézon de Fleury-les-Aubrais, à la Résidence Internationale d'Artistes en Argentine, à la
Synagogue de Delme en Lindre-Basse et au Pavillon, Laboratoire de Création du Palais de Tokyo. Depuis 2011, elle enseigne à l'École Supérieure d'Art et de Design Le Havre-Rouen.