Ouvrage collectif issu d'un projet de recherche mené par Sophie Orlando et Katrin Ströbel qui prend pour point de départ la manière dont les changements géopolitiques, économiques et sociaux actuels induisent un renouvellement et un ajustement des stratégies artistiques, en investissant, dans une perspective intersectionnelle, la pensée des contextes (économie de travail, réseaux, publics, modes de production, stratégies, outils, ressources) et la pensée féministe, queer et postcoloniale de manière artistique et conceptuelle.
L'atelier pratique et théorique Situations post est une communauté d'artistes nourri·es par une pensée de l'art
en situation politique, sociale, économique et affective. Nous y relions l'art collaboratif et participatif
aux gestes de traduction et d'annotation. Nous empruntons donc le terme de « situation » à un héritage
sociologique (école de Chicago, cultural studies, pédagogie critique), artistique (histoire de l'avant-garde
situationniste) et à une pensée des subjectivités féministes et décoloniales (Hooks, Haraway, Ahmed). Ce
livre ne s'inscrit ni dans la valorisation d'un art comme action politique directe, ni comme une catégorie
esthétique construite à partir d'une relation « théorique » à l'autre mais comme une pratique artistique
impliquant des gestes collectifs. Comme le dit Isabelle Stengers, « il est primordial de penser comment
donner aux situations le pouvoir de faire penser ensemble » (Résister au désastre, 2019).
L'ouvrage permet à la fois de rendre public et tangible l'apport critique de l'atelier Situations post en tant
qu'espace de travail initié à la Villa Arson (2014–2023) mais également la mise en mouvement d'un corpus
de pratiques collectives, transversales, éphémères. Elles ont des caractéristiques collaboratives, pédagogiques
ou encore inscrites dans la continuité des critiques institutionnelles. À partir d'invitations
formulées à une génération d'artistes parmi lesquel·les figurent Flo*Souad Benaddi, Karima El Karmoudi,
Filles de Blédards, Nelle Gevers, HaYoung, Sarah Netter, H·Alix Sanyas, Ghita Skali, Silina Syan, un
échange prolixe se tisse entre les formes textuelles et visuelles des auteurices Sara Ahmed, Annie Ernaux,
Stuart Hall, Marielle Macé, Bonaventure Ndikung, le collectif Qalqalah, Sayak Valencia ainsi que les artistes
M'barek Bouhchichi, Jagna Ciuchta, Nikolaus Gansterer, Stella Geppert, Laïla Hida, Maya Mihindou, Samir
Ramdani et Massinisa Selmani.
Sophie Orlando est autrice, historienne de l'art et chercheure, professeure en histoire et théories de l'art à l'École Nationale Supérieure, Villa Arson, Nice. Elle tente de comprendre la fabrique des savoirs artistiques et les processus de leur dénormalisation. Elle a publié de nombreux articles sur les politiques identitaires, les Black studies et l'art contemporain en Grande-Bretagne (Revue de l'art, Muséologie) et en particulier sur le British Black Art (Critical Interventions, Critique d'art). En 2016, elle publie British Black Art, Une histoire de l'art occidentale en débat (Dis Voir), puis conduit la monographie de l'artiste Sonia Boyce, Thoughtful Disobedience (Les presses du réel / Villa Arson). Elle a également co-édité un numéro des Cahiers du Mnam intitulé « Globalisées, mondialisées, contemporaines. Pratiques, productions et écritures de l'art aujourd'hui, 2013 ». En tant que chercheure du programme AHRC « Black Artists and Modernism » (2015-2018, UAL, Middlesex University, Londres), elle co-dirige avec l'artiste susan pui san lok et le commissaire Nick Aikens le colloque, puis l'ouvrage numérique Conceptualism : Intersectional Readings, International Framings (Van Abbemuseum, 2019).
Depuis 2019, elle participe aux approches critiques de l'éducation artistique. Elle dirige une édition numérique et une collection d'ouvrages « La surface démange » à propos des pédagogies critiques, institutionnelles et alternatives en art.
Katrin Anika Ströbel (née en 1975) vit et travaille entre Marseille, Stuttgart et Rabat. Ses dessins, œuvres in situ et installations sont basés sur un questionnement critique des conditions sociales et géopolitiques qui définissent notre quotidien. Le travail de Ströbel porte sur les codes culturels et les langages (visuels), mais aussi sur des sujets tels que le colonialisme, la migration et le déplacement forcé et montre à quel point les politiques du genre et de l'espace sont liées. Avec une perspective critique et ironique, l'artiste déconstruit les relations de genre et les stéréotypes féminins dans ses dessins et collages. Docteure en histoire de l'art,
Katrin Ströbel a pendant 10 ans à la Villa Arson à Nice. Elle est professeure à la Staatliche Akademie der Bildenden Künst ABK, Stuttgart.