Préface (
Robert Bonaccorsi)
« Non compatibles / Une peinture sans qualités » peut et doit se lire comme un hiatus dans la logique
de la programmation de la Villa Tamaris. Le lieu n'est-il pas désormais perçu, intégré, compris, dans
un rapport majoritaire (presque hégémonique, même si le terme ne reflète pas la réalité) à la
présentation d'une peinture d'histoire(s). D'un segment de l'art contemporain issu des années soixante
de l'autre siècle (la Figuration Narrative, la Jeune Peinture…) qui avait pour ambition de se confronter
au réel dans le cadre d'une réflexion critique sur l'image, l'icône, la notion d'oeuvre d'art, elle-même
arc-boutée sur les débats philosophiques et politiques du temps. L'art comme médiation,
engagement, voire utopie sociale. Cette constance s'inscrit désormais comme une nouvelle trace
mémorielle de cette « Villa Pacha » au passé complexe, quelquefois conflictuel, où la neutralité n'est
pas de mise.
La proposition de Catherine Perret constitue une réflexion en actes sur les conditions de production,
de présentation et d'échange de l'art contemporain et une labellisation impliquant l'indifférenciation
des lieux d'expositions.
« L'art mis aux normes du réseau de l'art contemporain disqualifie la réalité de son exposition (…).
L'art non compatible expérimente ce qu'il est d'habiter dans un espace où l'on ne communique plus.»
Le « ici et maintenant » de cette exposition s'inscrit dans l'expérience singulière, spécifique,
concrète, palpitante et incertaine, de l'oeuvre et du lieu. Une dialectique du in et du ex situ, du
mouvement de la mémoire et de ses multiples masques et faux-semblants.
Mieux que la rupture, s'énonce ici une solution de continuité, dans son sens médical, où la séparation
ne se conçoit que dans la continuité d'origine des tissus. Cette exposition s'apparente ainsi
paradoxalement à un point de suture entre deux approches d'un même désir d'analyse et de
résistance à la contamination de la production artistique par la virtualité consumériste labellisée.
« Derrière le système de l'art contemporain, il y a le mythe de l'art devenu mythe, tout juste propre à
hanter la marchandise-art. » La dimension critique du propos n'existe toutefois que par et pour
l'expérimentation, là où le rêve le dispute au concept. Les treize « archéologues du présent », réunis
par Catherine Perret explorent ainsi dans de multiples directions et toujours de façon rigoureuse et
sensible, les figures issues de la modernité. Aujourd'hui… A la Villa Tamaris.