La sixième édition de la triennale 50JPG du
Centre
de la photographie Genève a eu lieu du 19 juin au 25 août 2019.
Sous le titre
« OSMOSCOSMOS », l'exposition principale a tenté de réunir Éros & Cosmos, mettant en évidence le trait d'union entre
ces deux univers, un lien peu étudié dans nos cultures occidentales,
probablement trop marquées par les monothéismes et la culpabilisation
développée autour de l'éros visant à mieux soumettre l'individu à
l'emprise des églises.
Jean-Pierre Vernant, spécialiste de l'antiquité grecque, souligne que la
sexualisation du dieu Éros se fait au moment où Uranus est castré et qu'il
se dégage de Gaïa dans la souffrance pour devenir, au-dessus de nos têtes,
le ciel étoilé. Et pour le philosophe
Michel
Onfray, se référant au
Kama Sutra, le sexe est défini
ainsi : « ... naturel, en rapport avec le cosmos, jamais séparé du
monde, toujours là pour rappeler la liaison entre les parties d'un grand
tout ».
Une douzaine d'œuvres établissent cette relation entre les deux facettes
d'« OSMOSCOSMOS », telles que
Words and Stars de
Grazia Toderi et Orhan Pamuk ou les contributions de Ursula Böhmer, Bunu
Dhungana, Heidi Hassan, Eden Levi Am, Urs Lüthi,
Boris
Mikhailov, Johan Österholm,
Thomas
Ruff, Pierre Radisic, Catherine Radosa, Annie Sprinkle (avec Beth
Stephens), Christian Waldvogel et d'autres.
« OSMOSCOSMOS » assemble des œuvres photographiques
et vidéographiques contemporaines ainsi que diverses sources
iconographiques. Parmi les artistes sélectionnés, plusieurs d'entre eux
ont, dès les années 1970, mis radicalement en question la définition des
genres, voire la commercialisation d'Éros, que ce soit
Manon,
Jürgen Klauke, Renate Bertlmann, Natalia LL, Urs Lüthi, Barbara Hammer,
Annie Sprinkle (avec Beth Stephens) et Liliane Vertessen ; d'autres, à la
même époque, revendiquaient des esthétiques homosexuelles à l'instar de
Pierre
Keller ou de
Walter Pfeiffer,
revisitées sous une forme contemporaine par
Mauricio
Dias et Walter Riedweg. La trame
féministe
est poursuivie aujourd'hui par des artistes tels que Romy Alizée,
Dorothée
Baumann, Anne Collier, Déborah de Robertis, Nadia Granados,
Angela
Marzullo, Lina Scheynius ou encore A.L. Steiner, tandis que Eden
Levi Am,
Nicole Tran Ba Vang et Yuri
Nagashima traitent des amours lesbiennes et/ou queers.
S'il va de soit qu'Éros touche aussi à des problématiques politiques,
force est de constater que dans nos sociétés marchandes, il est gangrené
par des
intérêts économiques
très importants, comme le démontrent les propositions de Caroline
Bernard, Fred Lonidier,
Susan Meiselas, Charles Weber ou encore
Patrick
Weidmann.
Néanmoins, chacun – nous l'espérons – a pu faire l'expérience, dans
l'extase de l'union sexuelle, d'une sensation d'infini rappelant l'infini
cosmique.
Cosmic Fuck de Lee Lozano, seul dessin parmi les
œuvres présentées, en est l'expression abstraite. Toutes les évocations du
Cosmos sont principalement des simulacres d'artistes. En parallèle au
cosmos qui est hors de portée pour l'humain, comme par exemple les trous
noirs à 53 millions d'année lumière, « OSMOSCOSMOS » tient compte des enjeux politiques dans la relation que nous, Terriens,
entretenons avec le cosmos tout proche.
Pour assembler les parties d'un grand tout qui ne pourra jamais être
exhaustif, l'exposition est plongée dans la pénombre, éclairée uniquement
par les rayons émanant de la projection des images ou par l'illumination
de vitrines qui contiendront des impressions de toutes sortes.
L'exposition, réunissant un grand nombre d'artistes que le Centre de la
photographie Genève a déjà présentés, aspire à être une constellation
parmi d'autres, un atlas d'images où le visiteur est invité à constituer,
voire à prolonger son propre cosmos.
« Photographie de Mars de Georges Sailer, étoiles de Thomas Ruff ou Mauren Brodbeck, corps célestes de Pierre Radisic sondent ces rapports corps-cosmos formels ou poétiques : un grain de beauté sur la peau, un astre dans l'immensité. Cahiers cousus et couverture plastifiée transparente – comme les cahiers d'écoliers –, cette forme éditoriale souple et discrète matérialise l'intimisme d'un contenu propice au songe. »
Laura Samori,
Critique d'art
Avec
Romy
Alizée,
Nobuyoshi Araki,
Dorothée Baumann,
Caroline Bernard,
Renate Bertlmann,
Ursula Böhmer,
Anne Collier,
Déborah de Robertis,
Bunu Dhungana,
Dias & Riedweg,
Charles & Ray Eames,
Sylvie Fleury,
Paul-Armand Gette,
Nadia Granados,
Barbara Hammer,
Heidi
Hassan,
Philipp Keel,
Pierre Keller,
Martin Kippenberger,
Jürgen Klauke,
Jean-Jacques Lebel,
Eden Levi Am,
Armin Linke,
Natalia LL,
Fred Lonidier,
Lee Lozano,
Urs Lüthi,
Manon,
Angela
Marzullo,
Fabio Mauri,
Susan Meiselas,
Boris
Mikhailov,
Carlo Mollino,
Gianni Motti,
Jean-Luc Moulène,
Yuri Nagashima,
Johan Österholm,
Walter
Pfeiffer,
Peter Piller,
Thomas
Ruff, Pierre Radisic, Catherine Radosa,
Lina Scheynius,
Jules Spinatsch,
Annie Sprinkle & Beth
Stephens,
A.L. Steiner,
Jean Tinguely, Grazia Toderi & Orhan Pamuk,
Nicole
Tran Ba Vang,
Sarah Vadé,
Liliane
Vertessen,
Christian Waldvogel,
Charles Weber,
Patrick
Weidmann...
Publié suite à l'exposition éponyme à la Triennale 50JPG 2019 au Centre de la photographie Genève, du 19 juin au 25 août 2019.