Carnet basé sur le dernier dernier film d'Ursula Biemann, Acoustic Ocean, une expédition dans les profondeurs de l'océan Arctique à la recherche de communications interespèces (photogrammes accompagnés d'un essai d'Yvonne Volkart).
Dans cette narration semi-fictionnelle, l'aquanaute – interprétée par la chanteuse et activiste du peuple des Samis Sofia Jannok – tente de capter les sons d'animaux et de micro-créatures. Se mêlent ainsi dans le récit la mémoire de cette vie stockée dans l'eau et la perspective d'un futur climatique incertain.
La tâche de l'aquanaute est de sonder l'espace acoustique océanique et autres formes d'expression biologiques à l'aide de toutes sortes d'hydrophones, micro-paraboliques et divers appareils d'enregistrement. Etant donné la pénombre abyssale qui règne dans les eaux profondes, les manifestations sonores représentent des moyens de communication, de navigation et de survie essentiels pour la plupart des espèces.
Tourné dans les îles Lofoten au nord de la Norvège, Acoustic Ocean est une quête constituée d'un assemblage d'éléments humains, marins, mécaniques, organiques, climatiques et digitaux parfaitement interdépendants. Un fil technoorganique semble relier le corps de l'aquanaute avec l'environnement sonore qu'elle explore. Dans ce voyage scientifique, aucune forme de distance critique entre la chercheuse et son sujet, ils grandissent ensemble. Les hydrophones se répandent comme des tentacules sur la roche sombre, s'appropriant des caractéristiques des créatures abyssales. Cette figuration posthumaine et féministe suggère une porosité et une connexion entre le corps humain, l'eau et les nombreuses formes de vie qu'elle contient.
Publié à l'occasion des expositions d'Ursula Biemann « Acoustic Ocean » au Centre Culturel Suisse, Paris, et « Savoirs indigènes » au MAMAC, Nice, en 2020.
Avec une approche de chercheuse, l'artiste suisse Ursula Biemann (née en 1955 à Zurich) imagine des essais sous forme de
vidéos et de textes qui explorent le lien entre la
politique et l'
environnement.
Sa pratique artistique est résolument axée vers la recherche et comprend un travail sur le terrain dans des lieux éloignés où elle enquête sur les écologies politiques des forêts, de l'huile et de l'eau. Elle utilise un vaste éventail de media comprenant des vidéos spéculatives, des essais ethnographiques, des entretiens, des textes, de la cartographie, des explorations et du matériel scientifique. Son travail prend aussi la forme de publications, de conférences, de projets curatoriaux et de recherches collaboratives.
Ursula Biemann a reçu le Prix Meret Oppenheim – Grand Prix Suisse d'Art en 2009 et a été nommée Docteur honoris causa par l'Université suédoise d'Umeå en 2008.