Un essai critique en sept coup sur le jeu de bascule ironique institué par
Marcel Broodthaers entre
poésie et espace des arts plastiques, dans le prolongement de Mallarmé, pour faire surgir de nouvelles formes d'expositions et d'éditions, mettant en lumière les conditions de la production du sens au XXe siècle et les mythes qui la soutiennent.
En 1964, le poète belge Marcel Broodthaers se vend
aux arts plastiques en se faisant « artiste Pop ». Cet abandon
de la Muse au profit de la fabrication de produits visuels
a pour parrain Mallarmé : son Coup de Dés a inventé « l'espace moderne et contemporain de l'art », contre l'exaltation kitsch
du chant issue du Romantisme. Mais cette entreprise
de démythification par l'espace, soumise sans répit
à la marchandisation bourgeoise qu'elle avait pour vocation
de contrer, continue d'être habitée de muses et de sirènes invisibles. C'est à restituer leur présence que s'emploie Broodthaers, en transformant par des usages inédits
des matériaux « littéraires » empruntés à Nerval, Baudelaire, Mallarmé ou Heine. Surgissent ainsi, sous forme d'expositions
et d'éditions, la préhistoire au XIXe siècle de la société du spectacle, sa survivance prolongée dans notre présent, et les
modules de résistance qui s'y lovent.
Dans le jeu de bascule ironique institué par Broodthaers entre poésie et arts plastiques, Jean-Philippe Antoine repère l'invention d'un outil d'investigation créatrice, et l'essai d'une politique artistique que ne récupèrerait pas par avance le spectacle
de la culture.
« L'écriture de Jean-Phillippe
Antoine se place délibérément dans
les pas de Marcel Broodthaers en
emportant aussi bien les arts plastiques
que la poésie pour livrer un essai stimulant. »
Olivier Michelon, Vient de paraître
Philosophe, professeur d'esthétique et critique d'art, Jean-Philippe Antoine enseigne à l'université Paris 8. Il a soutenu sa thèse de doctorat sur les arts de la mémoire et la peinture italienne des XIIIe et XIVe siècles à L'École des hautes études en sciences sociales à Paris, et poursuit depuis ses recherches sur la question de la mémoire, de l'image et du lieu dans une perspective philosophique et anthropologique.
Il s'intéresse aux questions de mnémonique tant au Moyen Âge qu'aux XIXe et XXe siècles, et dans le travail de certains artistes contemporains tels que
Joseph Beuys,
Marcel Broodthaers ou
Mike Kelley. Il a également travaillé sur la question du récit de vie dans l'œuvre de Vasari, et sur l'œuvre de
Samuel Morse, peintre, photographe, théoricien de l'art et inventeur du code Morse et du moderne télégraphe électrique.
Plasticien, il mène des travaux sur des supports multiples : peintures, constructions, installations et performances sonores (en collaboration notamment avec
Leif Elggren).
Voir aussi
Samuel F. B. Morse : Conférences sur l'Affinité de la Peinture avec le reste des Beaux-Arts – Précédé par Jean-Philippe Antoine : Pour qui peindre et parler ? Un art de la conférence.