Publication documentant une œuvre vidéo éponyme de l'artiste palestinienne, mettant en scène les rapports de hiérarchie et de pouvoir qui accompagnent une transaction agricole entre une ville norvégienne et la plaine de la Bekaa au Liban. Avec un essai de l'historienne Shela Sheikh et un texte de Jumana Manna déroulant les réflexions qui l'ont menée à son projet (dans le cadre du programme « Satellite » organisé par le Jeu de Paume et le CAPC).
Dans son travail récent, Jumana Manna utilise la vidéo et la sculpture comme les supports d'une réorganisation de l'archive relative à l'histoire des pays du Proche-Orient et de l'Europe du Nord – qu'elle envisage comme des entités géographiques distinctes mais néanmoins liées. L'exploration porte ainsi sur la façon dont les formes de pouvoir – économiques, politiques, interpersonnelles – conditionnent aussi bien l'architecture que la vie humaine et végétale. Jumana Manna s'intéresse en particulier aux non-dits qui accompagnent les pratiques scientifiques actuelles de préservation ; son travail questionne ainsi les constructions binaires qui renvoient dos à dos un héritage pur et immuable et l'emprise de l'innovation.
Dans Wild Relatives [Parentés sauvages], un film réalisé spécialement pour la programmation Satellite, Jumana Manna traque les rapports de hiérarchie et de pouvoir qui accompagnent une transaction de semences entre la ville de Longyearbyen, dans l'archipel arctique du Svalbard (Norvège) et la plaine libanaise de la Bekaa. Le film suit le voyage des semences, retrace le parcours de ces formes de vie à mesure qu'elles sont extraites du sol et transplantées ailleurs, passant du sol aride au permafrost et vice-versa.
Publié à l'occasion de la double exposition éponyme au CAPC musée d'art contemporain de Bordeaux, du 23 novembre 2017 au 28 janvier 2018, et à la Maison d'Art Bernard Anthonioz, Nogent-sur-Marne, dans le cadre de la programmation hors les murs du Jeu de Paume, du 30 novembre 2017 au 4 février 2018.
Initiée en 2007, la programmation Satellite du Jeu de Paume est dédiée à la création contemporaine. Depuis 2015, le Jeu de Paume et le CAPC musée d'art contemporain de Bordeaux organisent conjointement ce programme d'expositions, assuré dès sa création par des commissaires d'envergure internationale (Fabienne Fulchéri, María Inés Rodríguez, Elena Filipovic,
Raimundas Malašauskas, Filipa Oliveira,
Mathieu Copeland, Nataša Petrešin-Bachelez, Erin Gleeson et Heidi Ballet). Pour cette édition 2017, intitulée « L'économie du vivant », le Jeu de Paume et le CAPC musée ont convié Osei Bonsu, commissaire d'exposition et auteur basé à Londres.
Prenant pour base le support
filmique, la programmation sera interdisciplinaire, invitant à un dialogue effectif et ciblé avec l'image mouvante. « L'économie du vivant », qui s'ouvrira avec
Ali Cherri et se cloturera avec Jumana Manna, est tournée vers la transmission et la préservation de l'histoire en tant que réceptacle de la mémoire vivante. Ces confrontations ouvriront l'espace propice à l'exploration du temps et de la temporalité que mènent
Steffani Jemison et
Oscar Murillo, dont les pratiques formelles mettent en évidence une poétique des gestes physiques influencée par ces facteurs socio-économiques que sont les usines, les projets d'aménagement urbain ou les parcs publics.
Les expositions de la programmation Satellite s'accompagnent de quatre publications, confiés chaque année à des graphistes indépendants. Les expositions de L'économie du vivant sont également présentées au Jeu de Paume à Paris et à la Maison d'Art Bernard Anthonioz à Nogent-sur-Marne en 2017.
L'artiste
palestinienne Jumana Manna (née en 1987, New Jersey, vit et travaille à Berlin et Jérusalem) est diplômée du CalArts ainsi que de l'Académie nationale des beaux-arts d'Oslo et de l'Académie des beaux-arts et de design Bezalel à Jérusalem. À travers ses
films et ses
sculptures, l'artiste interroge les façons dont le social, le
politique et les relations de pouvoir interpersonnelles interagissent avec le corps humain. Ses films mêlent faits et fiction, détails biographiques et documents d'
archives pour explorer la construction de récits historiques et nationaux. Ses sculptures, plus abstraites, se penchent sur les calcifications de la mémoire, représentée par des objets réels ou fabriqués.
Son travail a fait l'objet de nombreuses expositions personnelles, notamment à la galerie Chisenhale, Londres, Royaume-Uni (2015), à la Malmö Konsthall, Suède (2016), au Beirut Art Center, Beyrouth, Liban (2015), au Sculpture Center, New York, États-Unis (2014). Elle a également participé à des expositions de groupe au sein d'institutions internationales : Kunsthalle Wien, Vienne, Biennale de Liverpool, 20e Biennale de Sidney, 6e Biennale de Marrakech, Jerusalem Show VII, Fondation Al Ma'mal, Henie Onstad Kunstsenter, Bærum… Ses films ont été présentés au 54e Viennale International Film Festival, au 66e Berlinale Forum et à l'IFFR Rotterdam. En 2012, Manna a été lauréate du A.M. Qattan Foundation's Young Palestinian Artist Award et, en 2017, de l'
Ars Viva Prize for Visual Arts. En 2017 également, elle a été nominée au Preis der Nationalgalerie für junge Kunst à Berlin.