Monographie explorant l'héritage artistique et intellectuel de la peintre abstraite et pionnière des arts visuels en Iran Behdjat Sadr. L'ouvrage richement illustré propose un témoignage singulier croisant écrits intimes et coupures de presse, textes critiques et correspondance poétique.
Behdjat Sadr est la peintre abstraite des traces paradoxales, mêlant la nature la plus foisonnante et le monde industriel le plus tranchant dans ses œuvres qui parcourent la seconde moitié du XXe siècle. Pionnière des arts visuels en Iran – elle fut l'une des premières
femmes artistes et enseignantes à se déployer sur la scène internationale des biennales dès le début des années 1960 –, elle offre un témoignage singulier de la modernité cosmopolite qui prend forme entre Téhéran, Rome et Paris, villes où elle étudia, travailla et exposa. Behdjat Sadr incarne par-dessus tout, à l'image des couches de peinture multiformes qu'elle faisait jaillir et déborder, une extraordinaire fusion de l'œuvre et de la vie, élargissant notre vision de l'abstraction picturale et des limites entre la nature régnante et la nature intime. Cet ouvrage monographique est le premier du genre à explorer tant l'héritage artistique laissé par Behdjat Sadr que l'atmosphère intellectuelle des différentes époques traversées par son œuvre.
Ainsi l'ouvrage se situe entre la monographie ou le livre d'art « classique » et le carnet de route de ses voyages dans l'histoire et la géographie. En croisant en permanence l'œuvre et la vie, les écrits intimes et les coupures de presse, les textes critiques et la correspondance poétique – ses amis poètes Sohrab Sepehri et Forough Farrokhzad lui écrivaient régulièrement –, le livre se divise en cinq chapitres chronologiques : « Avventura italienne », « Arbre cosmogonique », « Persiennes persanes », « Lignes de vie », « Collage, mon beau souci ». Il retracera ainsi à la fois son parcours géographique (témoignage du cosmopolitisme qu'elle incarnait à merveille) et son parcours esthétique.
Après ses études à l'École des beaux-arts de Téhéran, l'artiste
iranienne Behdjat Sadr (1924-2009) part à Rome, où elle s'oriente vers une
peinture abstraite non géométrique. Abandonnant le châssis et les couleurs traditionnelles, elle utilise des peintures synthétiques de bâtiment qu'elle fait couler sur des supports disposés à même le sol. Elle procède ensuite par remodelage de la matière, avec une large spatule, produisant ainsi des traces, en négatif, de ses propres gestes. De retour en Iran dès la fin des années 1950, Behdjat Sadr est très vite repérée par Pierre Restany et plus tard par
Michel Ragon. Une grande variété de supports (comme les plaques d'aluminium) et de modes d'expression se déploie au cours de son long et singulier parcours. Atteinte d'un cancer dans les années 1980, elle vit entre Paris et Téhéran, réalisant notamment des photomontages dans un style original qui rappelle sa peinture. Behjat Sadr a présenté ses œuvres dans de nombreuses institutions en France et à l'étranger, parmi lesquelles : la galerie Bussola, Rome 1958 ; le musée d'Art moderne de la Ville de Paris, 1963, puis 2014; The Gray Foundation, Saint Paul, Minnesota, États-Unis, 1971 ; le musée des Beaux-Arts de Bruxelles, 1972 ; le Centre d'art Le Noroît, Arras, 1985 ; la Grey Art Gallery, New York, 2010 ; Asia Society, New York, 2013- 2014, et MAXXI Rome, 2015. Elle a également participé à la Biennale de Venise en 1962. En 2004, le musée d'Art contemporain de Téhéran lui a consacré une importante rétrospective dans le cadre des expositions dédiées aux pionniers de l'art moderne en Iran.