Gitte Schäfer s'est inspirée pour cet ouvrage d'un numéro de Die Kunst, Monatsschrift für Malerei, Plastik, Graphik, Architektur und Wohnkultur (revue allemande fondée en 1900 et publiée jusqu'à la fin des années 1980). Elle a emprunté la couverture défraîchie, le format et la mise en page d'un numéro de 1970, et remplacé les articles et les images d'origine par des photographies de ses propres travaux et des vues de ses expositions, transposant dans le livre la stratégie d'appropriation qu'elle utilise dans son travail plastique.
Cette publication rend compte de l'abondance des voies et des interprétations qu'ouvre le travail de Schäfer. La préface d'Eva González-Sancho souligne la dualité entre une production qui s'enrichit et se complexifie dans le déploiement spatial d'un ensemble d'œuvres et une contemplation plus affective, personnelle, dans le cas d'une présentation « individualisée ». Le texte de Fanni Fetzer, historienne des traditions populaires, interroge la mémoire imagée collective. Avec pour toile de fond les œuvres de Schäfer, le texte de Jacob Fabricius questionne sans apporter de réponse claire et définitive les origines familiales et forcément pleines d'affect de son goût pour l'art et sa collection. Dominic Eichler s'intéresse à la manière dont les objets et images du monde peuvent être récoltés, détournés de leur fonctionalité première et réagencés dans l'espace d'exposition pour évoquer des formes d'existence nouvelles ou oubliées. L'entretien de Frédéric Oyharçabal avec le psychanalyste Jean-Paul Abribat s'appuie sur le caractère éminemment « conversationnel » de l'œuvre de Schäfer pour esquisser les contours d'une œuvre qui refuse toute centration – et par extension celle du sujet – au profit de la multiplicité et de l'hétérogène.