Une série d'échanges relatifs aux questions du sexe, des sexualités et de la différence sexuelle, permettant non seulement une relecture du corpus de Jean-Luc Nancy et de ses développements au prisme de ce que ce dernier a appelé la sexistence, mais aussi la réinscription de l'élaboration de ce concept dans un tissu d'éléments biographiques et, partant, d'une exploration de la sexistence effective du philosophe. Cet entretien est accompagné d'un dessin et de gravures de Léa Falguère.
Dans cet entretien, Jean-Luc Nancy et Ârash Aminian Tabrizi agitent de sexe, du sexe, des sexes – de la sexualité, de la différence sexuelle ? – en tout cas, de ce que séparément, de ce qu'autrement, ils ont, tous deux, pu appeler, la « sexistence ». Ici, là, ça sexpose – sinon s'expose parfois – et ça pose « sexe » entre (d)eux.
Par le biais de « sexe », on relit la biographie et la philosophie ; on relie la pensée à la voix de l'écriture. On parle, par exemple, de l'enfance, des amours, du désir et de la jouissance. Mais, on se retourne aussi sur l'œuvre signé J.-L. N. et compulse les textes qui le composent pour distinguer les rumeurs du sexe, des sexes – des susurrements et murmures s'échappant dès les premières publications aux différents cris poussés plus franchement à partir des années 2000. Bref, on explore des corps, leurs mondes, leurs histoires : leurs présences, leurs souvenirs, leurs avenirs ; et on entre dans un corpus abondant pour le parcourir, par haltes successives, de ses commencements à ses conclusions d'alors.
Ainsi, là, ici, ça devise, ça fait suivre – une réponse après l'autre. Aussi sec, on s'ex : on questionne, on repart. On réplique, on repique. On déplace, on joue, on diffère, on supplémente. Et on n'hésite jamais à toucher certaines limites qui jusque-là, jusqu'ici, étaient encore restées ininterrogées. Par cette porte dérobée qu'est ce « sexe » posé, Sexpositions donne donc à lire la vie et l'œuvre d'un philosophe hors du commun, tout en promettant de continuer à écrire cette vie et cet œuvre et de les laisser s'excrire, et s'écrier peut-être même, toujours déjà autrement.
Léa Falguère (née en 1994) est artiste plasticienne, formée dans l'atelier dessin de l'Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles (ArBA-EsA) et initiée aux techniques de gravure dans plusieurs ateliers en Belgique et en Irlande. Son travail – dessiné, gravé et écrit – interroge la relation entre une impossible mise en figure du corps et la métaphore d'une « anatomie » de l'œuvre.
Jean-Luc Nancy (1940-2021) est l'une des grandes figures de la
philosophie post-moderne.
Professeur de philosophie à l'université de Strasbourg de 1968 jusqu'à son éméritat en 2004, où il a enseigné avec
Philippe Lacoue-Labarthe (avec qui il a publié plusieurs ouvrages), professeur invité aux universités de Berkeley, Irvine, San Diego et Berlin, ancien membre du Conseil national des universités, section philosophie, Jean-Luc Nancy était par ailleurs membre du conseil éditorial des
Cahiers Maurice Blanchot et dirigeait, avec
Mehdi Belhaj Kacem, la collection
Anarchies aux éditions
Diaphanes.
Son œuvre multiple comprend des travaux sur l'ontologie de la communauté et la métamorphose du sens, mais aussi des études sur les arts et la théorie de l'image ainsi que des réflexions sur les aspects politiques et religieux des évolutions du monde contemporain. Ses derniers textes ont cherché à opérer une déconstruction du monothéisme.
Voir aussi
Céline Guillot : Inventer un peuple qui manque : que peut la littérature pour la communauté ? – Blanchot, Bataille, Char, Michaux, Nancy, Agamben.
Formé à Bruxelles, Oxford et New York, Ârash Aminian Tabrizi (né en 1988) s'aventure aux frontières de la littérature et de la philosophie. Ses recherches concernent les écrits de jeunesse et les premières publications de Jean-Paul Sartre. Ses autres travaux portent sur l'écriture du sexe et des sexes, la réception en France de la philosophie allemande, les limites de l'esthétique et des arts, ou encore l'histoire de la contingence dans la pensée française de la Révolution à nos jours. Il a traduit de nombreux textes du français et de l'allemand vers l'anglais, notamment
Le Prénom de Dieu, le premier recueil de nouvelles d'
Hélène Cixous.