Un « atelier de la mémoire » articulant création artistique et réflexion théorique autour du génocide des Tutsi rwandais, rassemblant une vingtaine de contributions issues d'un travail sur un corpus d'archives multimédia relatif à l'histoire du
Rwanda.
« Il est fréquent de penser les meurtres de masse à partir des œuvres de création, en particulier celles des survivant.es. C'est là reconnaître que la littérature et l'art disposent d'une capacité particulière pour dire l'extrême, que ne possède pas nécessairement la réflexion théorique.
Travaillant sur le génocide des Tutsi, nous avons souhaité aller plus loin en n'étudiant pas seulement des œuvres existantes, mais en demandant à de jeunes écrivain.es – lors d'ateliers dirigés par Olivia Rosenthal et Dorcy Rugamba – d'en créer de nouvelles à partir des archives du Centre IRIBA de Kigali.
Il s'agissait pour nous de porter attention, comme y invite la notion de postmémoire, à la manière dont les traumatismes liés aux meurtres de masse se transmettent d'une génération à l'autre, suscitant des troubles psychiques chez ceux qui ne les ont pas connus ou n'en ont même jamais entendu parler.
À ces textes de création sont associées ici les interventions de théoricien.nes qui ont accompagné ces ateliers, en réfléchissant à la place des archives dans la mémoire collective et à la façon dont elles peuvent permettre, par le biais de l'invention littéraire, de partir à la recherche de sa propre histoire. »
Pierre Bayard et
Soko Phay
Voir aussi
Nathan Réra : Rwanda, entre crise morale et malaise esthétique – Les médias, la photographie et le cinéma à l'épreuve du génocide des Tutsi (1994-2014) ;
Rwanda, 1994-2014 – Histoire, mémoires et récits.
Pierre Bayard est professeur de littérature française à l'Université Paris 8 et psychanalyste. Il a publié une vingtaine d'essais, dont
Comment parler des livres que l'on n'a pas lus ? (Minuit, 2007),
Aurais-je été résistant ou bourreau ? (Minuit, 2013) et
Et si les Beatles n'étaient pas nés ? (Minuit, 2022). Il a aussi dirigé plusieurs volumes collectifs sur les crimes de masse dont
Écrire l'extrême. La littérature et l'art face aux crimes de masse (
Europe, 2006, n° 926-927) et
Les Dénis de l'histoire. Europe et Extrême-Orient au XXe siècle (avec Alain Brossat, Éditions Laurence Teper, 2008). Ses livres sont traduits dans une trentaine de langues.
Soko Phay est professeure en histoire et théorie de l'art contemporain à l'Université Paris 8 et au Nouveau collège d'Études politiques de l'Université Paris Lumières. Elle est directrice du Laboratoire « Arts des images et art contemporain » (AIAC). Elle a consacré plusieurs livres sur l'esthétique du miroir, dont
Le miroir dans l'art de Manet à Richter (L'Harmattan, 2001) et
Les vertiges du miroir dans l'art contemporain (Les presses du réel, 2016). Elle mène également ses recherches sur l'art devant l'extrême, dans ses relations avec la mémoire et l'histoire. Elle a dirigé ou codirigé
Cambodge, l'atelier de la mémoire (Sonleuk Thmey, 2010),
Cambodge, le génocide oublié (Cécile Defaut, 2013),
Figurations of Postmemory (Journal of Literature and Trauma Studies, 2015),
Cambodge cartographie de la mémoire (L'Asiathèque, 2017),
Archives au présent (PUV, 2017),
Les génocides oubliés ? (Mémoires en jeu, 2020) et (avec
Patrick Nardin)
Le paysage après coup (Naima, 2022). Elle a cofondé avec Pierre Bayard le Centre International de recherches et d'enseignement sur les meurtres de masse (CIREMM).
Ensemble, Pierre Bayard et Soko Phay ont réalisé un court-métrage (
Vann Nath, le peintre-mémoire, 2013, Labex Arts-H2H et Bophana Productions, 26 min) et co-dirigé plusieurs ouvrages collectifs :
Cambodge, mémoire de l'extrême (
Art Absolument, hors-série, 2010) ;
Cambodge, le génocide effacé (Cécile Defaut, 2013) ;
Art et postmémoire (
Art Absolument, hors-série, 2013) ; avec
Emmanuel Alloa,
Figurations of Postmemory (
Journal of Literature and Trauma Studies, 2015) ;
Des génocides oubliés ? (
Mémoires en jeu, n°12, 2020).