extrait
- J'aurais pu continuer à faire des pièces du même type, il me reste une vingtaine de dessins de cette période ; mais il fallait que je fasse des choses plus sauvages, plus dangereuses, comme remplir une galerie avec trois tonnes de terre. Ce dont j'avais envie était tellement incontrôlable qu'à ce stade-là, il n'y avait pratiquement plus de galerie qui soit capable de gérer les problèmes que je créais.
- Comment est-ce que ça a commencé ?
- Mon travail avec la terre ? Je dirais que ça a commencé en 1967, puisque j'avais appris à travailler le métal en 1965, 1966, donc en 1967 je savais ce dont j'étais capable. Je pouvais continuer à faire la même chose, ça marchait bien, des sculptures en acier ou en aluminium. Mais à partir de 1967 j'ai commencé à ne plus supporter New York et à rêver d'aller dans les mines de sel canadiennes, ou au pôle Nord, au pôle Sud, dans le Sahara... J'avais envie de faire l'expérience de l'espace, ce que je ressens quand je suis dans l'Ouest. En réalité c'était lié aux vraies crises, aux crises qui ont touché les grandes villes un peu plus tard. Je les ai senties venir à partir de 1967, avant que tout le monde ne comprenne que c'était impossible...
- Et pourtant tout le monde reste en ville.
- Oui, mais je pense que c'est pour ça que j'ai commencé à faire ces oeuvres conceptuelles, comme le Three Continent Project, l'idée de creuser une ligne d'un mile dans le Sahara, une autre en Inde, et un carré d'un mile de côté aux États-Unis. J'ai fait ça pendant l'hiver 1967. (...) Je voulais voyager, pas faire cette sculpture à New York mais aller creuser directement dans la terre, dans des endroits isolés, des déserts.