Abécédaire
par
Jean-Max Colard
(p. 4)
Dans les laboratoires scientifiques, la
deuxième fois est en fait la première.
Qu'un phénomène singulier se produise,
ce peut être le fruit du hasard ou d'une erreur
de manipulation. Mais que dans les mêmes
conditions l'affaire se renouvelle, et voilà
qu'une réalité apparue se trouve d'un coup
confirmée. La deuxième fois n'est donc pas
simple répétition : elle est bien davantage
une figure de l'insistance, une manière de
faire persister un ordre entrevu de la réalité.
En écho à la deuxième édition du
Printemps de Septembre à Toulouse menée
sous la direction artistique de
Christian Bernard, cette publication se voudrait un
autre « tube à essais », où des critiques d'art,
penseurs, philosophes, artistes et écrivains
se livrent à des élucubrations mentales.
Mais avec l'idée directrice que leur actualité
de pensée puisse croiser, sans trop directement
les commenter, les formes prises par
ce paradoxal « festival d'expositions ».
Après « Là où je vais, je suis déjà »,
l'intitulé « Là où je suis n'existe pas » donne
plus de conviction au choix d'un abécédaire
qui fonctionnerait une fois encore par entrées,
notions, idées, formules, et non par ordre
alphabétique de noms d'artistes. Histoire
d'apposer sur le festival une grille de lecture
décalée : ainsi a-t-il été choisi, avec les
« visuels » donnés par les artistes, d'organiser
des appariements nouveaux, de constituer
des diptyques inattendus, autrement dit de rebattre les cartes de la programmation, de
mettre ensemble des oeuvres qui ne cohabitent
pas physiquement dans les mêmes espaces
d'exposition, mais sont peut-être appelées à
se juxtaposer autrement dans une revisitation
mentale du festival.
Jean-Max Colard, commissaire associé du Printemps de Septembre à Toulouse.