Cet essai explore une facette de Hans Hartung (1904-1989) d'apparence improbable : les liens de ce géant de la peinture abstraite avec le cinéma. Il n'existe aucun film de Hartung, ni d'inclination réelle de sa part pour le septième art. Mais une enquête au cœur d'innombrables archives jusqu'alors inédites révèle des réseaux insoupçonnés : ce sont, entre autres, des réalisateurs comme Alain Resnais, Henri-Georges Clouzot,
Jean-Luc Godard, Éric Rohmer, plus récemment Larry Clark, qui ont admiré l'homme et sa peinture. Sa vie de héros antinazi, ex-légionnaire amputé au genou, traversé d'expériences cauchemardesques, mais déterminé à peindre ses « taches », passionnait. Qu'il ait été parodié, glorifié dans des décors de film, ou qu'il ait nourri des rôles campés par Anthony Perkins comme Maurice Ronet, Hartung est un fascinant point aveugle du cinéma. Cet essai le montre en « névropathe », en « escroc », en « dandy lettriste », en « artiste pascalien », et les caméras qui se sont emparées de lui livrent, en retour, des cadrages nouveaux sur son esthétique. Enfin, l'auteur exhume une constellation de films des années 1960-1970 sur l'art et les artistes. Autant d'éléments illustrés par une iconographie rare qui offre de Hartung une image bouleversée, réinventée : un « Hartung Nouvelle Vague ».
Pauline Mari est historienne de l'art. Spécialiste des liens entre le
cinéma et les beaux-arts, elle a notamment publié
Le Voyeur et l'Halluciné, au cinéma avec l'op art (Presses universitaires de Rennes, 2018) et été co-commissaire de l'exposition « Le diable au corps » au Musée d'Art moderne et d'Art contemporain de Nice, en 2019.