Première monographie de Séverin Guelpa, réunissant les travaux réalisés dans le cadre des projets MATZA, avec lesquels l'artiste suisse explore les formes de réappropriation de l'espace et les potentiels que représentent aujourd'hui les formes d'organisation collective qui s'y attellent, avec un essai de Simon Lamunière.
Véritable ancêtre de la pétition populaire, la matze est un tronc d'arbre que l'on arrachait et déplaçait de village en village dans le Haut-Valais (Suisse) dès la fin du XVè siècle afin de mobiliser les habitants autour d'une cause commune. Une fois convaincus, ces derniers plantaient un clou dans le tronc en signe de ralliement. En s'emparant de la matze comme objet liant ressources et communauté, Séverin Guelpa rejoue d'antiques codes sociétaux dans le champ de l'art. Matza Amboy, Matza Aletsch, Matza Kerkennah sont autant de lieux aux conditions extrêmes qui ont accueilli artistes et interventions et dont Simon Lamunière éclaire les étapes dans les trois sections qui composent cet ouvrage.
Le travail de Séverin Guelpa (né en 1974, vit et travaille à Genève) s'ancre dans une observation des transformations du territoire, des mouvements du tissu social et des conflits à l'œuvre, lisibles dans la matière même du paysage. Ses œuvres, souvent de caractère minimal, associent matériaux bruts, techniques de construction ou encore procédés artisanaux en mêlant aux signes des clivages sociaux ceux des rapports de force quotidiens. Par des procédés d'accumulation ou de manutention, ses installations cherchent la plupart du temps à mettre en lumière les rapports de force qui agissent sur le sol ou l'accès à ses ressources. Derrière ces questions, c'est de la démocratie et de notre relation à la terre dont il est question. Séverin Guelpa s'intéresse dès lors tout particulièrement aux formes de réappropriation de l'espace et aux potentiels que représentent aujourd'hui les formes d'organisation collective qui s'y attellent.
En 2014, Séverin Guelpa fonde le manifeste MATZA qui postule la capacité d'une communauté à se fédérer et inventer ses propres outils d'émancipation. Il invite des équipes d'artistes et de scientifiques à se confronter à des régions du monde extrêmes marquées par des problèmes d'eau ou de ressources. Considérant l'art comme un moteur possible de changements, le manifeste MATZA repose sur la recherche et le développement de modèles à même de renforcer la citoyenneté, la démocratie et l'autogestion en stimulant des formes d'intervention collective inspirée par les territoires investis.
Dès 2014, Séverin Guelpa s'intéresse au désert du Mojave marqué par une grave sécheresse. Il y crée MATZA Amboy et le Dryland Lab qui accueille en 2015 une première équipe puis en 2016 une deuxième session. Parallèlement, il crée MATZA Aletsch, une expédition de deux semaines sur le glacier d'Aletsch dans les Alpes Suisses (2016, 2017 et 2018). En 2017, MATZA ouvre un troisième site sur les îles tunisiennes de Kerkennah pour travailler sur les enjeux de la mer méditerrannée et de la pêche.
Parallèlement, Séverin Guelpa présente son travail dans diverses institutions. En 2017, il expose au
Palais de Tokyo (Paris), à la Ferme-Asile (Sion), lors de la Triennale du Valais ou encore au Musée National du Bardo (Tunis). Il remporte le prix Artpro 2016-2017 ainsi que le concours aparté 2017-2018.