La publication retrace le programme architectural mené par Pierre Bal-Blanc au CAC Brétigny de 2003 à 2015, un ensemble de projets in situ qui contribuent au développement des moyens de création et de pédagogie, favorisant les relations sociales entre l'intérieur et l'extérieur du lieu et les riverains.
Le « Projet Phalanstère » au CAC Brétigny est un programme architectural expérimental basé sur l'immanence de la création artistique. Il se déploie à travers une série d'œuvres développées, suite à des échanges à long terme avec des artistes, spécifiquement pour le site et excédant la durée de leur exposition temporaire. En tant que telles, elles favorisent le développement – dans une progression organique – d'un espace de création et d'expérimentation qui profite à ses visiteurs et usagers.
Qu'il se prolonge avec les différentes directions artistiques qui se succèdent sur le site ou qu'il se fige suite à l'éventuelle reconversion du lieu, le « Projet Phalanstère » subsistera par l'action des œuvres qui le constituent et par la mémoire de leurs influences que ce traité entend rendre vivante.
Cette publication propose de suivre une nouvelle syntaxe. Elle n'invite pas seulement à un renouvellement de la terminologie de la programmation dans un milieu artistique. Cette syntaxe est une construction qui s'est élaborée en s'édifiant progressivement à partir de la matière complexe des œuvres dans un certain contexte – celui d'un centre d'art situé dans la banlieue parisienne –, et non pas en s'inventant à l'appui des mots ou des discours proférés depuis une scène abstraite.
Le continuum visuel qui introduit le chapitre sur la partition des œuvres relate un ordre alternatif au temps institutionnel dans lequel le « Projet Phalanstère » s'est déployé. À la succession des durées des taches du calendrier du travail, c'est la simultanéité des puissances de la vie qui impose son rythme. Ce traité propose d'activer l'expérience des œuvres dans leur milieu en proposant une étude archéologique qui les situe chacune dans leur contexte culturel plus large. Sur place, la partition, faite de notices, permet de reconstituer mentalement certaines œuvres maintenant disparues ; ou à distance, de reconstituer entièrement le « Projet Phalanstère ».
La portée politique du « Projet Phalanstère » apparaît alors dans les formules agrammaticales énoncées par les œuvres et dans la résistance active qu'elles manifestent contre un pouvoir normatif qui concède les jeux de mots mais qui continue d'imposer l'exercice discipliné d'une administration de l'art.
Pierre Bal-Blanc