Une réflexion historique et théorique, aux confins de l'esthétique et du politique, sur la place décisive des
images et sur les pouvoirs et les limites de la représentation, à l'épreuve du dernier
génocide du XXe siècle.
Cet essai d'envergure retrace l'histoire de vingt années d'images ayant pour origine le génocide des Tutsi du
Rwanda. De nombreux qualificatifs, réducteurs et contradictoires, servent à définir les cent jours durant lesquels plus de 800 000 Tutsi furent assassinés, d'avril à juillet 1994 : « génocide sans images », « génocide en direct », « premier génocide télévisé »... Au lendemain d'une couverture controversée, les médias furent montrés du doigt pour n'avoir pas su dresser la chronique d'un “événement annoncé” ou, au contraire, pour avoir privilégié l'information spectacle aux dépens de la dénonciation politique. Le cinéma comme la photographie se sont chargés, dans une remarquable précocité, de déconstruire la logique des mass-médias en lui opposant les preuves effectives de l'horreur, en traquant ses traces dans les corps et dans les voix des victimes ou de leurs tortionnaires.
À travers le prisme de l'histoire rwandaise se sont ainsi rejoués les grands débats sur l'image nés du paradigme de la Shoah et de la crise du photojournalisme, forgeant au fil des représentations les pourtours d'un malaise à la fois moral, politique et esthétique. Afin d'en sonder la nature, l'auteur a choisi de remonter dans un premier temps le fil des images, au plus près des trajectoires des photographes et des cameramen qui furent, en 1994, les témoins parfois incrédules de ce « génocide de proximité ». Dans un second temps, il arpente dans toute sa largeur un corpus d'œuvres à l'articulation du cinéma et de la photographie, où se révèlent les enjeux sensibles de la mémoire post-génocide. Riche de nombreux témoignages, ce livre polyphonique mêle de manière inédite approche historienne et réflexions théoriques sur les pouvoirs et les limites de la représentation. Aux confins de l'esthétique et du politique, il est le lieu d'une interrogation profonde sur la place décisive de l'art et des images, à l'épreuve du dernier génocide du XXe siècle.
Docteur en Histoire de l'art, Nathan Réra travaille sur les représentations des génocides, l'étude des fonds d'archives (audio)visuelles et les relations entre les arts. Il a signé deux ouvrages aux éditions Rouge Profond : De Paris à Drancy ou les possibilités de l'Art après Auschwitz (2009) et Au jardin des délices – Entretiens avec Paul Verhoeven (2010). Il a également écrit le texte du dernier livre du photographe Christophe Calais, Un destin
rwandais (2014), publié aux éditions [Neus].