Cette publication, composée de deux livres fusionnés en un seul volume, documente et réunit deux projets d'exposition des artistes Nina Canell et Maria Hassabi à travers des essais, des matériaux inédits et un riche matériel photographique, constituant le moteur de deux récits visuels qui offrent de nouvelles clés de compréhension de la recherche des deux artistes.
L'installation live Here de Maria Hassabi invite les visiteurs à partager leur temps et leur présence avec six danseurs. Durant le mois où s'est déroulée l'exposition, six interprètes ont exécuté une chorégraphie à un rythme plus lent dans un environnement sculptural qui transforme l'espace de la Piste 1. Les mouvements des interprètes sont accompagnés d'une composition sonore : une voix féminine scande les secondes qui passent, de 1 à 14399'', soulignant l'éternel passage du temps. Immergés dans ce continuum constant, les mouvements des danseurs créent une situation de présence changeante, qui démontre la nature glissante de l'ici et maintenant.
L'exposition Hardscapes de Nina Canell présente deux œuvres à grande échelle, qui attirent l'attention sur les concepts de circulation et de transformation. Energy Budget (2017-2018), œuvre vidéo réalisée en collaboration avec Robin Watkins, est l'étude d'un escargot léopard explorant lentement un panneau électrique. Se fondant apparemment dans une forme hybride, les fluctuations musculaires de l'escargot réagissent à des circuits désaffectés et à un programme de champs électriques, devenant presque une partie de l'infrastructure. Les images intimes du mouvement de l'escargot sont juxtaposées à une séquence de plans des soi-disant portes dragons—de grands portails architecturaux construits selon les principes du feng shui. Ces ouvertures permettent aux dragons de traverser les gratte-ciel, leur permettant de voyager des montagnes à l'océan pour boire et se baigner. La vidéo est tournée à Telegraph Bay, un quartier de Hong Kong où le premier câble télégraphique sous-marin a été monté à la fin du XIXe siècle, avec une caméra qui se déplace dans un zoom arrière constant, utilisant de l'air comprimé pour contrôler le mouvement de l'équipement. L'absence de son dans la vidéo permet à une sculpture au sol de parler depuis le sol, remplissant l'espace de sa présence. Muscle Memory(16 Tons) (2021) est à la fois transformé et brisé par la densité des corps en mouvement, littéralement émiettés par les pas des visiteurs. Les coquilles de mollusques marins sont la matière première qui sous-tend la majeure partie de notre environnement bâti, y compris le sol de l'Officine Grandi Riparazioni. Le carbonate de calcium est en effet un composant fondamental du béton, un échafaudage essentiel pour tout type de bâtiment et de sol industriel. Commandée à l'origine par GAMeC, l'œuvre Muscle Memory (16 Tons) est relancée dans une nouvelle installation qui prend en compte l'histoire de l'OGR Torino en tant que chantier de réparation.
Outre les textes de la commissaire, la publication comprend des essais de Felicia Leu et Laura Preston, ainsi qu'une conversation de Maria Hassabi et Nina Canell avec Lorenzo Giusti.
Publié à l'occasion des expositions éponymes à OGR Torino en 2022.
Les installations de Nina Canell (née en 1979 à Växjö, Suède, vit et travaille à Berlin) donnent corps à l'immatériel et à la légèreté du quotidien. Les matériaux naturels qu'elle met en scène – eau, pierres, air, terre, bois ou cuivre – sont traversés par des arcs électriques ou des sources de chaleur, créant des réactions physiques délicates et éphémères qui soulignent et révèlent notre relation innée à l'environnement immédiat. Les œuvres de Nina Canell ont notamment été exposées au Moderna Museet (Stockholm), au Camden Arts Centre (Londres), à la Biennale de Sydney, au MoMA et au Swiss Institute (New York) ainsi qu'à la 13e Biennale de Lyon.
Maria Hassabi (née en 1973 à Chypre) est une artiste et chorégraphe, qui pratique tout autant la performance, les installations, la sculpture, la photographie et la vidéo. Depuis le début des années 2000, Maria Hassabi développe un langage singulier basé sur la relation du corps vivant à l'image fixe et à l'objet sculptural. Recourant à l'immobilité et à la lenteur, ses œuvres proposent une réflexion sur les concepts de temps et de la figure humaine. L'artiste use de différents moyens pour souligner la complexité de la structure formelle dans une variété de processus.