J'ai grandi entouré par l'art modeste sans le savoir. Ce fut longtemps ma seule référence esthétique, chez mes parents, au quartier haut à Sète, mais aussi chez mes oncles, tantes ou amis : les postes de télévision et les étagères surchargés de danseuses en coquillages, de céramiques et de verres filés rapportés d'excursion, de maquettes d'avions en plastique, de cadeaux Bonux, de fascicules de bande dessinée bon marché, les murs décorés de canevas patiemment brodés par ma tante.
J'eus d'abord accès aux œuvres d'art à travers les reproductions dans les beaux livres et les magazines spécialisés. Mais ces chefs d'œuvre n'étaient pas plus grands qu'une case de bande dessinée et me paraissaient tout aussi plats. Plus tard, lors de mes premiers voyages à Paris, bien avant que les centres d'art ne fleurissent en province, je pus enfin accéder aux peintures de Henri Matisse, Pablo Picasso, Jérôme Bosh ou Paul Klee.
Ce fut le jour où j'entendis le lapsus d'une petite fille qui voulait visiter à nouveau l'exposition Viva Di Rosa au Musée d'art moderne de la ville de Paris, que je pus enfin réunir sous le terme d'art modeste toutes ces créations inclassables que j'observais et collectionnais depuis des années.