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Animal ?
(p. 5-7)
Ce titre s'inspire des interprétations diverses faites par le public
du projet de la Canopée pour les Halles à Paris. Chacun y voyait une
forme animale ou végétale.
Aussi l'exposition — à l'occasion de laquelle est publié cet ouvrage —
remonte-t-elle aux sources en comparant l'architecture animale et les
premières architectures humaines. En les plaçant sur le même plan,
comme autant de manifestations de la vie, il apparaît que la notion
d'économie n'assèche pas leur richesse, mais que, bien au contraire,
elle en est l'acteur principal : l'optimisation du matériau, de l'énergie
de fabrication, des ressources et des contraintes d'un milieu, fait
apparaître pour chaque espèce et dans chaque condition, la forme
d'une géométrie singulière, un motif unique. De grands dessins
présentent la diversité de ces MOTIFS.
Nous faisons parallèlement un saut dans le temps et les échelles pour
considérer la physionomie de notre milieu contemporain qui est devenu
celui des métropoles. La question se pose de comment les représenter :
quelle REPRÉSENTATION utiliser ? La cartographie et la planification ne
semblent plus adaptées à l'étendue et à la vitesse des morphogenèses
urbaines contemporaines. L'aléatoire de l'étalement urbain m'a conduit,
en particulier, à expérimenter une modélisation informatique de cette
dynamique urbaine « hors contrôle ». Celle-ci est faite d'interactions
et d'effets dans l'apparition et la localisation d'activités. Les probabilités
deviennent ainsi un outil de conception pour « orienter » les formes
urbaines et non plus les planifier.
La forme animée, celle des activités et des usages, autrement dit le
programme de chaque projet de construction, devient une notion clef
pour comprendre les processus de transformation de la ville et de
l'architecture. La forme inanimée que constituent les constructions se trouve déduite des programmes. L'évolution et la variation d'un type
d'activité humaine sont arborescentes. Au fil de l'Histoire, des usages
se sont complexifiés, d'autres formes d'activités sont apparues,
certaines se sont dissociées, d'autres au contraire se sont agrégées.
Une carte où figure une fiction urbaine réunissant tous mes projets et
réalisations révèle ainsi trente-cinq ans d'histoire programmatique. Il
en ressort en particulier que la « vie parisienne » a privilégié, par
période, certains types de programme. Il n'y aurait donc pas en
architecture de fonction stable mais une évolution dans l'histoire de
ses programmes qui est à la source des formes qui les abritent.
L'architecture n'est pas seulement rationnelle, l'émotionnel s'y inscrit
toujours. La raison et l'imagination sont en fait toujours associées. Les
fonctions de mémoire et de projétation se situent dans la même partie
de notre cerveau, celle qui pense l'avenir. Notre relation à l'Histoire, les
mythes, l'imaginaire et l'arbitraire de l'artiste, sont à l'œuvre dans toute
conception architecturale. Ils produisent du symbolique.
Ensuite vient une présentation des œuvres que j'ai conçues au hasard
des commandes en face de fragments historiques de l'architecture. On
commence sur une voie romaine, puis à Cluny, à l'abbaye cistercienne
du Thoronet, devant la cathédrale de Chartres et pour finir, dans les
années quatre-vingt, avec le Palace à Paris. Ces réalisations
architecturales ou ces installations liées à des événements ont souvent
été conçues comme des scénarios proches d'une fiction entremêlant
les temps. Ce sont des HISTOIRES.
L'exposition se termine avec mes trois dernières conceptions
architecturales qui explorent trois notions.
Théorème
La première est une église à Saint-Denis. C'est une sorte de
« théorème » architectural car la forme optimise une figure
sociologique, une figure constructive et un signe symbolique.
Système
La deuxième est le siège social de Novartis France. C'est un
« système » architectural répondant à une densité perçue dans un
paysage urbain. Le ciel absorbe un jardin dans un jeu de pavillons en
verre et de terrasses.
Milieu
La troisième est la Canopée pour LES HALLES. C'est une porte du
Grand Paris conçue sur un site complexe. La notion de « milieu » oriente
le dessin de l'architecture. Sa forme a été modelée par toutes les forces
agissant sur le site.
Comment FAIRE LA FORME en architecture ? Voilà en résumé le
sujet de l'exposition dont le point de vue irrigue cet ouvrage.