Portraits en 22 tableaux composés d'après des œuvres et des paroles de Bertolt &
George Brecht.
Ce livre est un montage d'œuvres de Bertolt Brecht et de George Brecht – fragments de pièce de théâtre, poèmes, extraits théoriques, interview, event, comics, scénographie, collage, images... Ce livre est une proxémie, qui mesure l'espace « séparant » Bertolt et George, et souligne, en 22 tableaux, leur concordance. Preuve à l'appui, l'auteur révèle les affinités – non visibles, non cachées – entre les pratiques du dramaturge allemand et l'attitude de l'artiste conceptuel américain... Divisions outrepassées, l'art, la politique, la théorie, la pratique, le travail, le théâtre, la poésie, la vie, se voient ici corrélés.
Bertolt Brecht & George Brecht. Un dramaturge allemand, un artiste américain… Bertolt ou George. L'étude scolaire les oppose, il ne faudrait surtout pas tout embrouiller. Pour les brosser, nul sfumato ne serait possible. Bertolt proposerait un art miroir critique tenu à bonne distance de la vie. George initierait un art confondu dans la vie. Un continent les séparerait. Pourtant le peintre expose ici un portrait bifide éclaté en 22 tableaux ; il veut montrer que l'air de famille qui oxygène Bertolt & George est du même souffle que le vent qui les sépare.
Figures dans le paysage, ces portraits le peintre en a fait la scénographie par l'agencement des œuvres de Bertolt & George et de quelques images hétérogènes. Pour ne pas saturer la lecture aucune des citations n'est sourcée, les légendes des images accompagnent en fin de volume une bibliographie.
Pour subsister, l'auteur enseigne l'histoire de l'art. Cet ouvrage est le fruit d'une action picturale faite au bleu, pour exister le peintre enseignepeint à l'insu de son employeur et des ses élèves : Brecht aus !
George : — Je ne commence pas avec l'art.
Bertolt : — L'art ne peut pas avoir commencé,
Il ne peut pas non plus s'arrêter.
Qu'est-ce qui a commencé ?
— Le peintre peint all over, il arpente
l'espace élastique qui sépare Bertolt & George
il brise leur division.
— Il montre la secrète connivence
entre l'effet de distanciation bertoldien
et l'EVENT georgien.
— Il erre sur les ruines du quatrième mur,
et nomme ce lieu Béatrice.
« De cette invitation à prendre ensemble ces deux Brecht, on peut dire qu'elle relève elle aussi d'une sacrée méthode [...]. Le rapprochement opéré par Marissal n'en est que plus puissant [...]. Un livre foisonnant qui n'en est pas moins rigoureux, fruit d'une dizaine d'années de recherche, au sens fort, car c'est bien de cela qu'il s'agit, mais d'une recherche se situant toutefois à un autre endroit que la recherche universitaire, dans une perspective que l'on peut qualifier de « lecture-artiste » [...]. Dans le cas de Brecht & Brecht, on peut même parler d'une heuristique artiste. »
Vanessa Morisset, Sitaudis
Laurent Marissal, né en 1970 à Clichy, vit et travaille à Paris. Il se définit comme peintre sans peinture mais pas sans actions picturales.
Le récit de ses actions est compilé dans la série « Pinxit » sous la forme d'énoncés, de témoignages, de dessins, de rapports, de tracts, de lettres, d'anecdotes, de poèmes, de dessins, de photographies... Il reste peintre quelles que soient les circonstances. Cela commence en 1997, pour subsister il est gardien au musée Gustave Moreau mais pour exister en peintre il doit reprendre la peinture en dessous de zéro. Sans peinture, il réalise des actions picturales clandestines – renverser sa chaise de gardien, mettre ses doigts dans la peinture du musée rénovation... Sans peinture, il plie le temps de travail sur le travail du temps. Puis par des actions
syndicalespicturales – tract, grève, manifestation... Il parvient à réduire le temps de travail et à augmenter l'espace de pause... Il prend le surnom de Painterman, et publie le récit de sa désaliénation :
Pinxit (I).
Dans
Pinxit (II) – Où va la peinture, salarié dans un centre de formation en alternance, il résiste à la division du temps et peint les jours ouvrés comme les jours chômés. On peut le suivre retrouver Nietzsche entre deux papes, rencontrer
Kafka à Prague, périr par la nageuse, rendre un hommage pirate à
Sol Lewitt, déplacer la stèle de Félix Gattari sur d'autres tombes…
Pinxit (III) –
aca nada (il n'y a rien ici) se déroule entre Paris et Montréal. Le peintre a trouvé là son Arcadie, on le voit organiser une exposition clandestine dans un hôtel au Québec, peindre en parlant grâce au froid sur le Mont Royal, durant le printemps d'érable organiser une manifestation place du Canada à Paris concomitante de la manifestation place du Canada à Montréal, entre deux papes devenir indien, peindre la frontière entre les USA et le Canada, occuper le centre culturel canadien à Paris, communiquer avec un astronaute canadien en orbite…
De retour à Paris, Laurent Marissal alias Painterman s'oppose à bibendum, inaugure la vitrine fantôme de Robespierre au musée du Barreau de Paris, serre la main à Caïn, fait le portrait de Brecht & Brecht, organiser des actions non alignées... Depuis 2012, il publie, rédige, dessine et diffuse
Nada, le journal des actions non visibles non cachées de Painterman en milieu hostile comme en Arcadie.