La dimension sociale et l'horizon politique de l'émergence d'une culture de l'image portée par la pratique amateur de la photographie en Allemagne à l'aube du XXe siècle.
Entre 1888 et 1914, la photographie s'est massivement diffusée en Europe et singulièrement dans
la société allemande, profitant de l'activité de nombreux clubs photographiques. Ces clubs encadraient
l'essor de la pratique photographique en publiant des revues, en organisant de grandes expositions
qui impliquaient, avec la photographie d'art, de nombreux domaines d'utilisation de ce médium :
l'astronomie, la biologie, l'anthropologie, la topographie et, de plus en plus fréquemment, la documentation
du folklore européen.
L'espace public ainsi formé faisait émerger une culture partagée
à visée citoyenne, fondée sur les images. D'abord dédiée à l'éducation de l'œil en art et en science,
cet espace public tendait de plus en plus à se replier sur les identités régionales et nationales en
employant les amateurs comme source de documentation ethnographique.
Pourquoi étaient-ce les
amateurs, et non la presse, l'industrie ou les institutions culturelles, qui se trouvaient placés au cœur
de ce projet ? Quel était l'horizon politique de ces images dans une Allemagne marquée, après le
retrait de Bismarck, par ce qu'on peut appeler une crise d'identité culturelle ? Quel fut exactement le
rôle de ces images dans la construction « par le bas » d'une identité nationale ?
« En proposant une approche du sujet et de la culture visuelle (...) parfois “en dehors de l'art” (volonté assumée et justifiée par l'auteur), Joschke réalise un tour de force. Gageons que chaque chercheur trouvera dans cet ouvrage de l'intérêt, que ce soit dans l'approche novatrice du statut d'amateur, dans l'approche globalisante de la thématique ou dans le développement des thèmes secondaires. »
Francois Maheu, Histara
Historien de l'art et germaniste (traducteur notamment de
Horst Bredekamp et
Hans Belting), Christian Joschke est maître de conférences au département d'Histoire de l'art
et d'Archéologie de l'université Paris Ouest – Nanterre – La Défense.