Les dessins blanc sur noir réalisés par l'artiste suisse depuis plusieurs la fin des années 1990
Depuis la fin des années 1990, lorsqu'il n'est pas plongé dans son travail de plasticien (en collaboration avec l'artiste Anders Guggisberg) ou d'artiste de scène (sous le nom de Dr. Lüdi), Andres Lutz produit une multitude de ce qu'il appelle des schwarze Blätter – des « draps noirs ». Ses dessins blanc sur noir sont un étrange mélange d'ascétisme et de fantaisie ludique. Le plus souvent sans plan préconçu, Lutz trempe son stylo dans l'encre blanche et le déplace sur une surface noire vierge, qui est aussi un espace imaginaire, une fenêtre la nuit, produisant une fissure de lumière sur une toile noire tendue, comme une fente faite par un cutter.
La ligne blanche ajoute au monde quelque chose qui n'y était pas dix secondes auparavant : c'est la magie essentielle du dessin. Il s'agit de véritables plaisanteries visuelles, certes, mais aussi – du moins dans l'intention – de petites œuvres d'art raffinées, que l'on peut classer librement ou résolument en catégories ou en chapitres : dessins humoristiques, caricatures politiques et apolitiques, jeux de mots et énigmes, rébus et casse-tête, images secrètes à scruter et à chérir. Il y a aussi des gribouillis enfantins, des portraits de philosophes, des esquisses d'installations et de sculptures imaginaires, par exemple une série de crânes qui sont aussi des récipients. Il y a aussi des paysages oniriques, des paysages urbains, des dessins sur le thème de l'étalement urbain ou de l'évasion fiscale. Il y a aussi des insectes, des pétroglyphes néolithiques de Carélie et des bisons dessinés dans des grottes du nord de l'Espagne. En outre, des représentations de coutumes locales et étrangères, des illustrations de recettes, des cours ésotériques, des fleurs et des arbres, des arbres et des légumes, des buissons et des fougères, des animaux appartenant à l'empereur, comme l'a dit Borges... Enfin, des wimmelpictures psychédéliques regorgeant d'objets cachés, dont la découverte est un délice cosmique.
Tout cela est nourri par le penchant irrépressible du Dr Lüdi pour l'ironie joyeuse, qui est naturellement une façade pour la mélancolie et s'écoule à travers la plume du stylo, une pointe aussi étroite que le chas d'une aiguille, dans un monde parallèle, un paysage étoilé nocturne.
Né en 1968 à Wettingen, Andres Lutz vit et travaille à Zurich. Il fait partie du duo d'artistes
Lutz & Guggisberg. De 1996 à 2003, il s'est produit avec Gerhard Meister dans le cadre du duo de scène « Geholten Stühle ».