Cette luxueuse publication en grand format présente 365 collages réalisés par l'artiste entre le 27 octobre 2021 et le 26 octobre 2022, sur papier ou sur carton, à l'aide de différents médiums (crayon graphite, crayons de couleur, encre, feutres, marqueurs Posca, pastel, peinture, peinture acrylique, Scotch, stylo bille).
« L'exercice est toujours périlleux pour l'artiste de vouloir expliquer ou encore situer une oeuvre, son origine, sa gestation. Dans le cas précis de cette série des trois cent soixante-cinq collages, au contraire, rien de plus simple. Il y a eu, en effet, un déclencheur : la proposition de Marc-Olivier Wahler d'illustrer, pour la revue du musée d'Art et d'Histoire (MAH) de Genève, ma propre plongée dans ses collections. Quelle approche allais-je adopter ? Me vint l'idée d'associer une forme en vue de définir tant le musée que moi-même visiteur. Le collage me parut l'évidence : qu'est-ce donc qu'un musée, a fortiori celui-ci, qui réunit des pièces de nature et d'époques composites, sinon un vaste collage culturel ? Et qui suis-je, moi regardeur et moi manipulateur d'images et de mots, sinon un collage mental de références hétéroclites dans un certain désordre assemblées ?
Le collage en tant que technique alors propice aux métaphores ? Pourquoi pas. Dans le Faust de Johann Wolfgang von Goethe (traduit par Gérard de Nerval), on trouve cette réplique de Méphistophélès : "On peut avec des mots discuter fort convenablement, avec des mots bâtir un système." Il en va de même pour le collage, si l'on veut bien voir qu'il est à la fois langage visuel et textuel et réservoir de mythologies personnelles. On peut assurément via le collage "bâtir un système" : celui de métaphores sans clés prédéfinies, ni souci d'unité sinon le nombre. Les trois collages destinés au MAH ont servi en quelque sorte d'embrayeur à cette série de trois cent soixante-cinq (un par jour), conçus comme une écriture automatique à partir d'éléments me tombant sous la main, ouvrant par effraction au vertige du sens. Hiatus formels, métissages improbables, dispositifs truqués, ressorts secrets, érudition factice, tout concourt aux lectures démultipliées sans garantie critique : chacun la sienne ! »
Arnaud Labelle-Rojoux
Arnaud Labelle-Rojoux (né en 1950 à Paris) est artiste et essayiste. Il s'est d'abord fait connaître dans le circuit de la
performance, dont il est devenu l'historien avec son livre
L'Acte pour l'art (Les Éditeurs Évidant, 1988 ; rééd.
Al Dante, 2004). Depuis, il a publié une dizaine d'ouvrages, dont
L'Art parodic' (Java, 1996 ; rééd. Zulma, 2003),
Leçons de scandale (Yellow Now, 2000),
Je suis bouleversé (Semiose, 2007),
Twist Tropiques (
Loevenbruck et Yellow Now, 2013),
Duchamp (collection
Icônes, Éditions François Bourin, 2020).
Voir aussi
Mathieu Copeland : En affinité(s) – Allan Kaprow / Arnaud Labelle-Rojoux.