La découverte d'une archive majeure : un document exceptionnel de l'unique performance du trio Tony Conrad, Arnold Dreyblatt et Jim O'Rourke.
Au cours d'un programme de deux soirées organisé par David Weinstein dans la légendaire salle expérimentale new-yorkaise Tonic en janvier 2001, Conrad, Dreyblatt et O'Rourke ont présenté des projets individuels avant de jouer chaque soir un set en collaboration, le premier avec des membres de l'ensemble de Dreyblatt et le second avec le trio entendu ici. Comme le souligne Dreyblatt dans les notes accompagnant le disque, il s'agissait d'une collaboration entre générations, reflétant l'impact profond du minimalisme pionnier de Conrad sur Dreyblatt et O'Rourke. Dreyblatt et O'Rourke ont tous deux abordé cette collaboration avec une profonde reconnaissance de la musique de Conrad et des principes d'intonation juste qui la sous-tendent, Dreyblatt ayant découvert l'incroyable puissance des violons accordés avec précision par Conrad lorsqu'il était archiviste pour
La Monte Young en 1975, tandis que O'Rourke s'est produit avec Conrad dans divers contextes depuis le milieu des années 1990 (tout en admirant, rééditant et interprétant la musique de Dreyblatt). Le prospectus du concert annonçait « des harmoniques massives, extatiques et pulsantes », et le trio a certainement tenu ses promesses. Dès le début de ce flot de cordes jouées à l'archet, il est clair, comme l'écrit Dreyblatt, que nous sommes dans « l'univers sonore de Tony », alors que des combinaisons de hauteurs choisies avec précision, massivement amplifiées et évoluant lentement, remplissent la salle de motifs de battements complexes et d'écarts de tonalités fantomatiques. Pendant plus de vingt-cinq minutes, la musique atteint un niveau d'intensité comparable à celui d'enregistrements classiques tels que
Four Violins de Conrad, jusqu'à ce que la texture rétrécisse légèrement dans le dernier quart de la représentation, permettant à l'auditeur de reconnaître pour la première fois les voix individuelles qui composent cet immense et imposant édifice harmonique. Le flux constant de sons à l'archet est interrompu par un ample pizzicato monocorde de Conrad, les sons graves glissants et le chatoiement métallique des autres cordes entraînant les derniers moments de la série dans un détour inattendu vers un psychédélisme pastoral spacieux.
Bien qu'elle ait été produite par trois personnalités célèbres chacune pour leur œuvre personnelle, il s'agit d'une musique dépourvue d'ego, l'expression parfaite du désir de Conrad de « passer de la composition à l'écoute », de « travailler sur le son à partir de l'intérieur du son ». D'une importance historique et d'un impact sonore considérables, cet album est aussi un hommage émouvant à Tony Conrad de la part de deux musiciens profondément marqués par son art et sa vie.
Tony Conrad (né en 1940 à Concord, États-Unis) est un
musicien et compositeur d'avant-garde,
artiste sonore,
artiste vidéo et
cinéaste expérimental, écrivain et professeur au Department of Media Study de l'université de Buffalo. Le film expérimental
The Flicker (1966), une succession d'écrans noir et blanc, et les
Yellow Movies (années 1970), série de peintures abstraites en constante évolution, comptent parmi ses œuvres les plus remarquables. Conrad fut membre du Theater of Eternal Music, avec John Cale,
Angus MacLise,
La Monte Young et
Marian Zazeela. Sa collaboration musicale avec le groupe de krautrock Faust,
Outside the Dream Syndicate (1972), demeure un classique du minimalisme et de la musique drone.
Arnold Dreyblatt (né en 1953 à New York) est un artiste multimédia et un compositeur américain, installé à Berlin depuis 1984. Inventeur d'instruments, associé au minimalisme new-yorkais, collaborateur de nombreux artistes rattachés au mouvement
Fluxus, Dreyblatt est considéré comme l'un des précurseurs de la musique
drone.
Arnold Dreyblatt a étudié avec les compositeurs
Pauline Oliveros,
La Monte Young et
Alvin Lucier et les pionniers de l'art vidéo Woody et Steina Vasulka. Qu'il se produise en solo avec sa contrebasse modifiée, ou entouré de son ensemble emblématique Orchestra of Excited Strings, Dreyblatt développe au moyen de son propre système d'accordage microtonal, une musique hypnotique et pulsative. L'œuvre d'Arnold Dreyblatt a été interprétée par l'ensemble Bang On A Can,
Jim O'Rourke, le Great Learning Orchestra de Stockholm, le Pellegrini String Quartet et le Crash Ensemble de Dublin. Il a enregistré pour des labels tels que Tzadik, Hat Hut, Table of the Elements, Cantaloupe,
Important, Choose et
Black Truffle.
Compositeur, improvisateur, musicien multi-instrumentiste et producteur, Jim O'Rourke (né en 1969 à Chicago, vit et travaille à Tokyo) est une figure essentielle du rock indépendant et du post-rock américains (ses disques solo parus sur Drag City ou en groupe avec Gastr Del Sol et
Sonic Youth sont tous devenus des classiques des années 1990 et 2000) autant que de la musique expérimentale et électroacoustique.
Véritable caméléon aux frontières de genres musicaux très variés (rock noise, pop, improvisation libre, électroacoustique, musique traditionnelle, etc.), ses collaborations sont innombrables : Illusion Of Safety,
Christoph Heemann,
David Grubbs,
Loren Connors, Wilco, Henry Kaiser, K.K. Null, Günter Müller, Voice Crack,
Evan Parker,
Phill Niblock, Mats Gustafsson,
Tony Conrad, Faust, Space Streakings, Loose Fur,
Fennesz, Diskaholics Anonymous Trio, Carlos Giffoni,
Keiji Haino,
Masami Akita, Masaya Nakahara,
Takehisa Kosugi, Fire!, Akira Sakata,
Oren Ambarchi,
Stephen O'Malley,
Kassel Jaeger,
Anthony Burr, John Fahey, Tortoise, Stereolab, Red Crayola, Guided By Voices,
Merzbow...