Le deuxième numéro de la revue de l'Observatoire de l'Espace du CNES, qui bâtit des corpus de pièces graphiques ou photographiques produites au fil des programmes spatiaux et sollicite le regard d'historiens de l'art et de chercheurs en sciences humaines afin d'enrichir une connaissance de l'aventure spatiale fondée sur ses archives visuelles.
Ce deuxième numéro de la revue
Strate(s) rassemble quatre nouveaux corpus visuels de l'aventure spatiale. Le premier corpus constitue un panorama visuel de la première grande exposition sur l'Espace qui s'est tenue en 1927 à Moscou. Il est éclairé par un texte de
Remi Parcollet, historien de l'art. Le deuxième ensemble, consacré aux représentations du module de service de la station spatiale soviétique MIR, est analysé par Nicolas Nova, socio-anthropologue. Le troisième retrace l'histoire de la fusée postale, de ses origines en Allemagne jusqu'à ses derniers essais dans les années 1960, avant son abandon définitif. Sébastien Richez, historien de la Poste, s'attache à caractériser les différentes étapes de ce projet singulier. Enfin, le quatrième et dernier ensemble entraîne le lecteur dans la fabrication des ballons stratosphériques, véhicule largement utilisé dans la recherche spatiale et développé en France de manière artisanale dans les années 1960. L'historienne des sciences Catherine Radtka, à travers une analyse du travail et de la place des femmes dans cette aventure, effectue une dissection visuelle de cette activité naissante.
Ces quatre thématiques – une exposition de machines interplanétaires en 1927, la station spatiale MIR, les fusées postales et la fabrication des ballons stratosphériques – pour disparates qu'elles soient, forment un répertoire dont l'usage peut certes être patrimonial mais aussi plastique. Parfois étonnantes, souvent inédites, ces images de l'aventure spatiale déploient une bien plus grande diversité du point de vue formel que celles généralement retenues pour les besoins de la communication scientifique. La portée de ces photographies et archives graphiques peut ainsi dépasser le seul cadre historique et bien fournir à qui souhaitera s'en saisir la matière d'un travail de création.
Notre mémoire visuelle, collective, de l'Espace est peuplée d'images emblématiques : le sourire de Youri Gagarine, le pas sautillant de Neil Armstrong sur la Lune, la fusée
Saturn V qui s'arrache à la Terre, les vues de l'univers profond par le télescope Hubble, la Terre bleue perdue seule dans le cosmos et les astromobiles caracolant sur la planète Mars. D'autres images, pourtant, ont été produites au fil des programmes spatiaux et de leurs épisodes oubliés, moins spectaculaires, tels des campagnes de lancement de fusées ou de ballons dans des territoires lointains, la construction de lieux disparus une fois leur fonction accomplie, la mise en œuvre de véhicules spatiaux désormais inaccessibles et bien sûr le quotidien de ceux qui y ont contribué.
Photographies, plans, dessins et schémas invitent à découvrir l'univers spatial à hauteur d'homme ; ces représentations visuelles sont l'objet de la revue
Strate(s) et publiées pour leur valeur iconologique intrinsèque ou pour les savoirs qu'elles mettent en exergue. En bâtissant des corpus et en rapprochant des pièces d'archives graphiques ou photographiques dispersées dans des fonds publics et privés,
Strate(s) engage une étude méthodique de ces matériaux, sollicitant le regard aussi bien de l'histoire de l'art que des sciences humaines pour les analyser et en examiner les potentialités en termes de compréhension des problématiques contemporaines de l'exploration spatiale. Ces enquêtes pluridisciplinaires, conduites à différentes échelles d'observation afin de décrire et de saisir les enjeux des pratiques, des expériences, des constructions complexes que recèlent ces documents d'archives et leur interdépendance avec le discours, le texte et l'idéologie, enrichissent une connaissance de l'aventure spatiale fondée sur ses archives visuelles.
Strate(s) est publiée par l'
Observatoire de l'Espace.