« Cette publication présente un ensemble de sept films :
The Pitch (1998),
Cold Morning (2009),
Hendon F.C. (2009),
Forte! (2010),
Cigarette Smoker at the Cafe Grazynka Warsaw (2010),
The Moving Image (2011) et
Above and Below the Minhocão (2014).
Les plans-séquences courts et silencieux de Mark Lewis, comme les
premiers films des frères Lumière, opèrent par prélèvement d'un fragment de réel, dans une même unité de temps, d'espace et d'action. Tout ce qui surgit au
fil des images obéit au cours aléatoire de la vie. Mark Lewis privilégie ainsi l'irruption de l'accident à la narration construite, l'incursion dans un déroulement
imprévisible à la reconstitution d'une scène.
Sont particulièrement scrutés les moments de pause ou de transition, les micro-événements et les gestes infimes du quotidien. De ce théâtre familier, ils
révèlent les tensions intérieures mais aussi la part d'énigme. Le rythme lent du film accentue cette sensation de mystère, d'étrangeté qui naît de l'attention
extrême portée aux choses.
Concentrer notre regard, le ralentir, qu'il devienne à la fois flottant et inquisiteur est pour Mark Lewis le moyen le plus sûr de nous rendre sensibles à la poésie
du rien et conscients de l'enjeu du tout. Ces petits détails sous-tendent-ils une mécanique plus globale ? De quels espaces géographique, social ou politique
ces bribes de réel témoignent-elles ? De quelles ruptures sont-elles les indices ? Que ce soit dans le surplomb ou l'infiniment petit, le temps immuable ou
transitoire, il importe avant tout ici de contempler les vestiges de nos utopies modernes. »
Diane Dufour
Mark Lewis – Above and Below est un ouvrage entièrement édité à partir de plans-séquences de films de Mark Lewis. Conçu par Diane Dufour,
Chantal Pontbriand et la jeune designer Agnès Dahan, il est l'un des premiers livres qui tente de traduire graphiquement le travail du vidéaste (plans séquences, mouvements de caméra, etc.) en montrant une dizaine de films dans leur intégralité grâce à des captures d'écran. Les doubles pages reprennent la construction et le langage du travail vidéo, et mettent en évidence l'attention extrême portée par Mark Lewis aux gestes et aux mouvements des personnages dans des situations du quotidien – tout est ralenti, tout est amplifié, intensifié. Un catalogue qui repousse les limites du livre de photographie en documentant un travail vidéo.
Publié à l'occasion de l'exposition éponyme au Bal, Paris, de février à mai 2015.
Né en 1958 à Hamilton au Canada, Mark Lewis vit et travaille à Londres. Captant des scènes du quotidien ou des situations emblématiques de notre époque, ses
films courts font souvent référence sans citation directe, à l'histoire de la peinture, de la photographie et du cinéma.
Mark Lewis s'installe à Vancouver de 1989 à 1997 et participe à l'éclosion de la scène
photo-conceptuelle de l'Ecole de Vancouver. À partir du milieu des années 1990, il commence à réaliser des films courts, de quelques minutes seulement, en 35 mm d'abord puis en vidéo, destinés à l'espace du musée où ils sont projetés le plus souvent en grand format. Mark Lewis travaille le dispositif cinématographique lui-même, utilisant le potentiel des mouvements de caméra afin d'offrir une lecture inédite du monde contemporain.
Rush Hour,
Morning and Evening,
Cheapside (2005) et
Isosceles (2007) témoignent déjà de la virtuosité avec laquelle il aborde des situations en apparence anodines. Les films récents,
Man (2012),
Smoker at Spitalfields (2012) et
City Road 24 March 2012 (2012) soulignent la pictorialité de visions urbaines quotidiennes souvent en référence à l'histoire de la peinture. Son film
Black Mirror at the National Gallery (2011) explore l'interaction entre l'espace muséal, le miroir et le dispositif cinématographique.
Parmi ses œuvres les plus récentes, il a réalisé en 2014 trois films en Corée du Sud sur la zone démilitarisée à la frontière avec la Corée du Nord et, à l'occasion de la 31e Biennale de Sao Paolo, sept films à São Paolo. Son projet
Invention imagine une ville contemporaine sans images en mouvement (ni téléphone portable, ni télévision, ni internet….) qui devient ellemême cinématographique, avec son intense concentration de corps en mouvement, de jeux d'ombres et de reflets. Ce vaste projet inclut les œuvres réalisées à l'occasion de la Biennale de Sao Paulo, mais aussi les quatre films créés pour Le Louvre en 2014.
En 2009, Mark Lewis représentait le Canada à la 53e Biennale de Venise. Les musées suivants lui ont consacré une exposition personnelle : Van Abbemuseum (Eindhoven, 2013), Vancouver Art Gallery (Canada, 2008), Ps1 (New York, 2006), Forte Di Bard (Italie, 2011), Man – Museo D'Arte Provincia di Nuoro (Italie, 2009), Art Gallery of Ontario (Toronto, 2010), Akademie der Bildenden Künste (Vienne, 2008), FACT (Liverpool, 2006), BFI Southbank (Londres, 2006) et musée du Louvre (Paris, 2014).
Mark Lewis est professeur d'art au Central Saint Martins, University of the Arts London, cofondateur avec Charles Esche de
Afterall, une structure londonienne dédiée à l'édition et la recherche, et éditeur de
Afterall Books,
One Work Series.