Une crise de l'objet s'ouvre quand les marchandises et les artefacts marqués au poinçon de l'utilité envahissent et façonnent la société.
Marcel Duchamp réplique au « tout fait » par l'élection ironique du
ready made. Les surréalistes procèdent autrement. Ils donnent vie à l'objet à travers une rafale d'actions, d'inventions et de détournements : objets volés, objet-mannequin, objet onirique, boules de neige, objets trouvés, objets à fonctionnement symbolique, poème-objet, etc. Pour eux, l'imaginaire tend à devenir réel. Et ce n'est pas en vain que le rêve rencontre la veille, que le désir croise le hasard. Le merveilleux peut advenir et se concrétiser.
Emmanuel Guigon et Georges Sebbag montrent à travers ce feuilleton de l'objet surréaliste comment les poètes Aragon, Breton ou Crevel, les artistes Bellmer, Cornell,
Dalí,
Giacometti ou Paalen ont proposé de nouveaux agencements ou de nouvelles connexions entre les jeux, les fétiches, les modèles mathématiques, l'
art brut, la morphogenèse et les trouvailles surréalistes. La problématique de l'objet surréaliste conduit aussi à s'interroger sur les équipements ou les appareils de nos sociétés numérisées et technicisées.
Chercheur à la section scientifique de l'École pratique des hautes études hispaniques (Casa de Velázquez), à Madrid, conservateur en chef de l'IVAM1, à Valence (Espagne), de 1995 à 2001, puis conservateur en chef du musée d'Art moderne et contemporain de Strasbourg de 2001 à 2006 et directeur des musées de Besançon de 2007 à 2016, Emmanuel Guigon est le directeur du Musée Picasso à Barcelone.