Peu de photographes du XIXe siècle ont suscité autant d'attention que Julia Margaret Cameron (1815-1879). Abondamment critiquée de son vivant pour la liberté dont elle faisait preuve à l'égard des conventions de la photographie de son époque, admirée dans le même temps pour le caractère inspiré de ses portraits, Cameron est aujourd'hui encensée pour sa contribution révolutionnaire au médium. Pionnière du gros plan, n'hésitant pas à recourir à une mise au point légèrement floue, puisant dans la religion, la littérature et l'histoire nombre de ses sujets, elle a laissé une œuvre singulière, à nulle autre pareille.
À propos de Julia Margaret Cameron, l'écrivain
Virginia Woolf, sa petite-nièce, évoquait une « vitalité indomptable ». Née Julia Margaret Pattle à Calcutta (actuel Kolkata), fille d'une aristocrate française installée à Pondichéry et d'un fonctionnaire anglais de l'administration du Bengale, élevée entre la France et l'Inde, elle a rejoint l'Angleterre en 1848 lorsque son mari a pris sa retraite de l'administration coloniale britannique. Ils s'installèrent alors sur l'île de Wight, où ils s'entourèrent d'écrivains et d'artistes tout en conservant des liens avec leurs amis et parents établis d'un bout à l'autre de l'Empire britannique.
La carrière photographique de Cameron fut brève mais intense. Elle reçut son premier appareil photographique à l'âge de quarante-huit ans, en 1863, et se mit immédiatement à photographier ses proches, famille, employés de maison, voisins célèbres ou habitants de son village. Excentrique, généreuse et autoritaire, elle a marqué par son engagement artistique ceux qui l'approchaient et posaient pour elle. Son travail, qu'elle rangeait en trois catégories, « portraits », « madones » et « sujets d'imagination », fut exposé en Grande-Bretagne comme à l'étranger, diffusé commercialement et envoyé par elle-même à des proches, amis et mentors. Lorsqu'elle retournera vivre à Ceylan (actuel Sri Lanka), elle aura produit en douze ans des centaines d'images et écrit un court texte autobiographique,
Annales de ma maison de verre, dont plusieurs des citations reproduites dans le présent ouvrage sont tirées.