Une enquête approfondie qui renouvelle la compréhension du japonisme à partir de l'art français du XIXe siècle, écartant la tentation de l'exotisme orientaliste tout en inversant la logique de l'influence, avec un corpus iconographique abondant et lui aussi entièrement renouvelé.
« Il est tout à fait évident, écrivait Pierre Francastel en 1937, qu'il ne faut pas confronter Japon et japonisme » : c'est cependant ce qu'on n'a cessé de faire.
À rebours d'une approche néo-positiviste qui voit dans le japonisme le résultat d'une influence, ce livre analyse à nouveaux frais un étonnant phénomène d'innutrition, dont l'histoire matérielle est indissociable du programme conceptuel : levier épistémologique, l'art japonais fonctionna comme un génial indicateur et conforta des convictions antérieures à l'ouverture du Japon. Limiter l'étude du japonisme à la France, loin de rétrécir le sujet, l'élargit en permettant de reconstituer ses capillarités et la circulation des représentations dans un milieu osmotique, frémissant d'échos littéraires et artistiques, à une époque où la presse façonnait les représentations esthétiques et sociales. La constitution d'une « planète japonisme » a occulté les débats internes auxquels répondit la révélation des arts du Japon, qu'on ne peut dissocier de l'acclimatation du préraphaélisme en France et plus généralement du médiévalisme. Écartant les « japonaiseries » (les bibelots et les toiles orientalistes), inversant la logique de l'influence, rendant un rôle moteur aux prétendus influencés, ces pages accompagnées d'une iconographie nouvelle se concentrent sur le japonisme comme « révolution de l'optique », suivant l'heureuse expression de Jules de Goncourt reprise par son frère Edmond, souvent citée mais mal exploitée. D'Ingres à l'Art nouveau dont le japonisme, contrairement aux idées reçues, n'est pas la conclusion mais en partie l'antidote, elles restituent, dans leur cadre discursif, les phases de son évolution au miroir d'une Grèce en plein bouleversement, en associant largement les écrivains et les critiques d'art, ces acteurs essentiels, grands oubliés d'une histoire qui a sous-estimé les réseaux de sociabilité de la culture d'accueil. Si le japonisme devint un phénomène international, c'est bien parce qu'il fut, d'abord, un art français quand Paris, capitale du XIXe siècle, aimantait les imaginations.
« Ce livre-somme comble assurément une lacune de l'histoire du regard et du goût à la fin du XIXe siècle. [...] C'est un voyage dans l'espace-temps si particulier du japonisme que nous propose magistralement Sophie Basch, agrémenté d'une riche et magnifique iconographie qui embarque le lecteur sur ces mondes flottants, propices à la rêverie autant qu'à la réflexion. »
Cyril Barde, Acta Fabula
« Erudit et drôle, ingénieusement illustré [...], le livre prend appui sur les analyses d'un chapelet d'artistes, d'amateurs et de critiques, qui rivalisent de formules assassines pour démontrer que les arts du Japon ne sont qu'un miroir-sorcière dans lequel la modernité occidentale apparaît déformée. [...] Histoire décapante d'une vogue française, anthologie formidable de la critique d'art jusqu'aux années 1920, ce livre constitue aussi le catalogue en près de 250 images d'un cabinet d'amateur digne des pages de Georges Perec. » François Lachaud, Le Monde
« Livre d'histoire de l'art écrite par une spécialiste de la littérature française, cette étude d'un courant majeur pour l'histoire des formes mobilise un très vaste appareil de sources loin d'être toutes familières à l'historien de l'art. [...] Le Japonisme, un art français est l'un de ces ouvrages qui font aimer le Paris fin-de-siècle, celui des images et celui des écrivains. En lisant Sophie Basch, on est ébloui par la qualité de ces innombrables littérateurs, créateurs du japonisme, qui méritent assurément leur titre de "critiques-artistes". L'empathie manifeste de l'auteure à leur égard n'est certainement pas étrangère à sa propre écriture, si plaisante, si heureusement éloignée des slogans du prêt-à-penser. » Emmanuel Pernoud, Nouvelles de l'estampe
Spécialiste de l'orientalisme littéraire, artistique et scientifique, de la littérature fin-de-siècle et de l'histoire culturelle, Sophie Basch est professeur de littérature française à la Faculté des Lettres de Sorbonne Université et membre senior de l'Institut universitaire de France. Elle est notamment l'auteur de Rastaquarium. Marcel Proust et le « modern style » (2014).