Yann Beauvais
Juste un bout dans un autre –
En contexte abîme…
(extrait, p. 101-102)
On connaît d'eRikm, avant tout sa pratique musicale en tant que «platiniste» ou «performeur sonore», mais on
connaît moins son travail plastique dans lequel la production vidéo occupe une place prépondérante depuis
2007 (même si son usage remonte au début des années 2000).
Si le travail musical fait entre autres, appel à des samplers bas de gamme (Kaoss Pad) disposés en anneau pour
les faire tourner en boucle et créer ainsi un feedback né de rien sinon de lui-même
(1) favorisant la déperdition
de l'élément sonore choisit, on retrouvera dans les propositions visuelles d'eRikm une similarité d'attitude et
de geste qui privilégie de courtes séquences ou fragments « explorés numériquement dans un rapport de
désincarnation, fragmentation synthèse générationelle d'un ou de plusieurs éléments
(2) ». Parmi les diverses
vidéos réalisées par l'artiste, plusieurs explorent l'idée de l'effacement, de la disparition de l'information partielle
proposée selon des systèmes de transformations autant aléatoires qu'improbables. Nous sommes souvent en
présence d'une instabilité qui ne nous permet pas de nous attacher à un élément figuratif ou narratif. Face à
de tels systèmes, nous trions et tentons de comprendre ce qui advient à chaque proposition. La diversité des
opérations, la plasticité des bandes favorisent l'égarement en fonction de la dégénérescence de l'information.
Les œuvres visuelles ont un statut particulier pour eRikm, ce que l'on pouvait découvrir à travers les multiples
installations, dessins, photos et sculptures présentées au sein de deux expositions monographiques récentes
(3).
La multiplicité des propositions soulignait l'importance de la dimension plastique dans le travail de l'artiste, qui,
par-delà les procédures, vise à créer des environnements autant que des objets spécifiques.
Aujourd'hui dans le champ musical, l'élément visuel soutient bien fréquemment la performance du musicien,
meublant l'espace visuel; comme si le son ne se suffisait pas et qu'il fallait impérativement l'accompagner d'une
réalisation visuelle virtuose, spectaculaire ou monumentale. Chez eRikm, le recours à la vidéo, à la projection
d'image, va dans un sens qui est délibérément non spectaculaire, offrant ainsi à chaque proposition la possibilité
de ne pas être comprise, comme le fait de manière exigeante la bande “aUTOPORTRAIT”, sur laquelle nous
reviendrons plus loin et “va©uum” quelle que soit sa forme de présentation.
(...)
1 - Ainsi que le décrit
Vincent Normand dans un
article de Frog magazine, 2006.
2 - Note à propos de “Corner” et “Générescence soustractive”, eRikm, et à propos de “Variations opportunistes” qui sont des “frames” bloquées.
3 - “MU”, Galerie de la friche Belle de Mai à Marseille (juillet/août 2010) ainsi que “mOnO”, à l'
Espace multimédia Gantner">espace multimédia et culture numérique Gantner, Bourogne
(juillet/septembre 2010).