Les œuvres emblématiques de la sculptrice et artiste textile belgo-polonaise produites dans les années 1970, dévoilant l'attention portée par Tapta à la tactilité des matériaux, la souplesse des structures, la pratique individuelle et collective, et l'interaction entre l'œuvre d'art, l'espace et le spectateur.
Dans les années 1960 et 1970, Tapta fait partie d'une nouvelle génération d'artistes qui cherchent à repenser la sculpture en introduisant des textiles et d'autres matériaux souples comme éléments sculpturaux. Ce faisant, elle a contribué à faire sortir l'art textile des catégories de l'ornement et de l'artisanat.
Cette publication est issue de l'exposition éponyme à WIELS, Bruxelles, en 2023. Cette exposition se concentre sur les œuvres emblématiques de Tapta dans les années 1970, où elle s'éloigne toujours davantage du tissage traditionnel grâce à des techniques expérimentales, comme la torsion de pièces tissées, mais surtout l'utilisation de cordes qu'elle noue et enfile. Ses œuvres deviennent tridimensionnelles et interagissent de plus en plus avec l'espace et le spectateur, qui est invité à en faire le tour, et même à y pénétrer, afin de compléter la vision par une expérience tactile et physique.
À travers des vues photographiques de l'exposition, le lecteur est invité à (re)découvrir les « sculptures souples » historiques de l'artiste et les nouvelles œuvres de Greet Billet, Hana Miletić et
Richard Venlet, qui ont été inspirées par la pratique de Tapta et réalisées spécifiquement, ou adaptées, pour l'exposition.
Tapta (Maria Wierusz-Kowalski, 1926-1997)
est une sculptrice belge d'origine polonaise, dont le travail influent a contribué à
redéfinir radicalement la sculpture en utilisant des
textiles et autres matériaux souples comme éléments sculpturaux, et à diversifier la création textile au-delà des catégories du décoratif et de l'artisanal, ouvrant la voie vers la recherche pluridisciplinaire.
Installée en Belgique depuis l'âge de 18 ans comme réfugiée politique, après avoir participé à l'Insurrection de Varsovie,
à l'issue de ses études, Tapta vit pendant une dizaine d'années au Congo où elle expérimente certaines techniques locales notamment le trempage des tissus dans différentes solutions.
En 1976, elle rebaptise l'atelier d'Art textile de La Cambre, qu'elle dirigera pendant 14 ans,
et qui prend le nom de « Sculpture souple », afin de remettre en question les composantes solides de la sculpture contemporaine, se rapprochant en ce sens du courant « Anti-Form » de
Robert Morris. L'engagement de Tapta comme enseignante n'est pas moins important que sa pratique artistique. Plutôt que de former ses étudiants à une technique particulière, elle donne la priorité au développement d'un esprit ouvert et critique. Elle compte notamment parmi ses étudiantes
Ann Veronica Janssens, Monica Droste et Marie-Jo Lafontaine.
Tapta recourt fréquemment à des cordages, comme pour
Voûtes flexibles (1983-1985) conçue pour la station de métro Veeweyde, à Bruxelles. Toutefois, son parcours est singulier dans la mesure où, dès le début des années 1980, elle prend une fois pour toutes ses distances avec l'art textile qu'elle juge trop décoratif. Elle adopte alors des matériaux industriels comme le néoprène, caoutchouc synthétique, qui lui permet de jouer sur des qualités tout à la fois de souplesse et de rigidité. À partir de cette époque, elle interroge la flexibilité des matières, la rigueur et la radicalité des lignes et des formes, privilégiant le noir mat qui, selon elle, intensifie l'énergie et la tension. Se posant aussi en critique du monde contemporain et du monde postindustriel, elle conçoit des espaces et des lieux de passage dans lesquels elle transgresse les frontières entre l'intérieur et l'extérieur, le plein et le vide, avec des œuvres qui peuvent être présentées aussi bien horizontalement que suspendues.
Tapta meurt – soudainement – en 1997, au moment même où son pays natal, la Pologne, découvre son œuvre à l'occasion d'une grande exposition personnelle à la Galerie nationale d'art Zacheta, à Varsovie.
