Le théoricien du graphisme Thierry Chancogne ambitionne une révision du récit historique habituellement adopté par sa discipline en proposant une archéologie du graphisme avant l'avènement de la modernité. Ce premier volume constitue un recueil de matériaux transdisciplinaires envisageant la graphie avant l'apparition de l'écriture.
Le graphiste, le designer graphique, le typographe semblent apparaître avec la notion toujours complexe de modernité, en tous cas avec le mouvement d'une industrialisation plus consciente d'elle-même. C'est ce que paraît soutenir le grand défenseur de la modernité, Robin Kinross, lorsqu'il situe les débuts de la modern typography au XVIIe siècle, alors que l'artisan imprimeur sort de son atelier noir pour prendre le recul réflexif du libraire qui édite des contenus ou du typographe qui pense, institue et relaie sa pratique dans des manuels professionnels.
Mais est-ce à dire qu'on ne puisse parler de graphisme avant l'institution de cette modernité et de cette pratique du graphiste ? C'est à cette question intempestive que veut s'attaquer Thierry Chancogne, enseignant et théoricien du graphisme, en tentant de repérer les moments de rupture de phase de l'histoire longue de cette discipline avant même qu'elle ne soit reconnue comme telle.
Premier temps et premier mouvement de cette « histoire », il sera question dans ce recueil de matériaux les plus divers que l'auteur aura pu rencontrer – artistiques, techniques, éthologiques, anthropologiques, psychologiques, archéologiques, etc. – d'envisager la graphie avant l'apparition de l'écriture, de penser le graphisme au temps plus ou moins originel de l'oralité et du mythe, avant la confiscation du logos par le prestige un brin exclusif de l'écriture.
Thierry Chancogne est enseignant et théoricien du
graphisme, co-fondateur de la revue en ligne
Tombolo, de l'association d'édition
Tombolo Presses et du projet de local pédagogique Ravisius Textor.