Une version éditée d'une pièce radiophonique conçue et produite par Jan Jelinek pour la radio publique allemande SWR2, rassemblant douze collages de poésie sonore à partir de réponses à des interviews de personnalités publiques, de
Marcel Duchamp à Lady Gaga.
Chaque collage est constitué de brefs moments entre les mots prononcés : silences, pauses pour respirer et hésitations au cours desquels les personnes interrogées émettent des particules sonores non sémantiques. Ces collages de voix contrôlent également un synthétiseur, créant des sons électroniques qui se superposent et fusionnent avec les voix pour former douze structures acoustiques.
Les ratés sont inhérents à la locution : bafouillage, mauvaise prononciation, pauses, silences et faux départs. Il en résulte des retards, un bruit de langue comparé par Roland Barthes aux à-coups produits par un moteur en panne. Ces décalages sont déconcertants, car ils constituent une défaillance de la rhétorique de l'orateur. Mais que se passe-t-il lorsqu'ils deviennent un facteur constitutif, poétique ?
Zwischen (« entre » en allemand) se compose de douze réponses à douze questions. Les réponses ont toutes été enregistrées dans des situations d'interview. Les pauses sont extraites du discours des personnes interrogées – toutes des personnalités publiques éloquentes – et montées ensemble. Le résultat est une série de collages sonores du silence. Mais ce silence est trompeur, car c'est seulement le sens qui se tait. Ce qui reste audible, c'est un langage corporel archaïque : des modes de respiration, des phases de préparation, des particules de mots en attente de sens qui peuvent éclater en tumulte onomatopéique ou dériver en bruit sonore.
Dans une étape ultérieure, chacun des douze collages commande un synthétiseur modulaire par son amplitude et sa fréquence. Les actes de parole prétendument défectueux conduisent des sons synthétiques et les locuteurs retrouvent leur sang-froid – non pas par la parole, mais par le son.
Les « répondants » sont : Alice Schwarzer,
John Cage,
Hubert Fichte,
Slavoj Žižek,
Joseph Beuys, Lady Gaga, Ernst Jandl, Karlheinz Stockhausen,
Marcel Duchamp, Friederike Mayröcker,
Yoko Ono et Max Ernst.
Jan Jelinek est un compositeur allemand de musique électronique (également connu sous les pseudonymes
Farben, Gramm, The Exposures et
Gesellschaft Zur Emanzipation Des Samples) installé à Berlin. Son travail, apparu au début des années 2000 avec des
albums pionniers comme
Loop-Finding-Jazz-Records et
Textstar (Farben) dont l'esthétique minimaliste, à la fois « glitch » et organique, opérant une réduction des éléments rythmiques de la musique de club, a fortement marqué l'époque, s'est développé vers des expérimentations basées sur la transformation des sons. Traduisant les matériaux sources de la musique populaire en textures abstraites et épurées, Jelinek construit des collages en utilisant de minuscules fragments sonores provenant d'une grande variété de dispositifs d'enregistrement : magnétophones, échantillonneurs numériques, lecteurs de médias, etc. Les enregistrements sont traités en boucles répétitives qui ramènent l'original à l'essentiel produisent une transformation poétique de l'acoustique quotidienne.
Jan Jelinek est le fondateur du label
Faitiche.
Voir aussi
Gesellschaft Zur Emanzipation Des Samples ;
Farben ;
Beispiel (
Frank Bretschneider & Jan Jelinek) ;
Groupshow (Jan Jelinek,
Hanno Leichtmann &
Andrew Pekler).
