11e Biennale d'art contemporain de Lyon – Une terrible beauté est née

« Ceci n'est pas un catalogue de la 11e Biennale de Lyon. C'est en fait l'une des œuvres de la 11e Biennale. Ou bien, si l'on veut, une autre Biennale possible : la miniature d'une Biennale qui a pu être (...).
L'ordre des textes et des images de ce livre peut être comparé à celui des poèmes dans un recueil de poésie, ou à celui des nouvelles dans un recueil de nouvelles. Il n'est ni hasardeux, ni fantaisiste, ni rationnel, ni spatial, ni chronologique. Un texte a suggéré une image, une image a appelé un texte. Ainsi s'est élaboré ce livre.
Les textes présents dans ce livre ne sont pas au service des œuvres de la 11e Biennale, ils ne les illustrent pas ni ne les expliquent. Ils ne parlent pas d'elles, ils parlent avec elles. Ils sont, eux aussi, des œuvres de plein droit.
Ce livre, ainsi, se compose principalement d'une série de reproductions d'œuvres d'art : certaines essentiellement visuelles, d'autres verbales. Ce montage d'œuvres visuelles et verbales engendre, comme tout montage, de nouvelles images, de nouveaux textes, des significations multiples. Le lecteur peut lire ce livre dans l'ordre, ce qui sera comme parcourir une exposition d'art, ou lire un livre, ou vivre. Il peut aussi le feuilleter dans n'importe quel sens, ce qui sera comme rêver d'une exposition après l'avoir parcourue, ou vivre une autre vie possible.
Le système actuel des expositions entraîne les visiteurs, de plus en plus, à lire les textes des cartels qui introduisent ou expliquent l'œuvre, plutôt qu'à regarder ou à expérimenter l'œuvre ; parfois, au lieu de regarder ou d'expérimenter l'œuvre. Ainsi l'œuvre demeure-t-elle subordonnée au texte, et le texte à l'œuvre, dans une relation de servitude mutuelle qui ne bénéficie à personne. Cette Biennale et ce livre cherchent, dans la mesure de leurs modestes possibilités, à renverser ou du moins à signaler cette tendance. »
Victoria Noorthoorn, Carlos Gamerro, Ruben Mira, Alejandro Tantanian