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Cet ouvrage est le prolongement textuel d'un projet artistique et performatif conçu par l'artiste Raphaële Bidault-Waddington et le critique Sylvain Menétrey. Mi-néologisme poétique, mi-concept scientifique, le sémiospace apparait comme une création langagière reflétant la pratique de Raphaële Bidault-Waddington, créatrice d'objets hybrides, à la fois modèles cognitifs empruntés à la science et fictions exubérantes.
Sémiospace : le concept polysémique prolifère, progresse par plis et dépliages, selon un modèle en expansion permanente. Il sert de méthodologie de travail et fait œuvre d'installation en mouvement. Sa dynamique générative révèle petit à petit son ambition de théorie du tout et se laisse emporter dans le chaos du cosmos. S'agit-il de lire les signes de l'univers pour mieux les organiser en modèles fictifs et en réalités alternatives ? Ou de proposer des architectures de l'espace discursif pour voyager toujours plus loin dans les profondeurs de la pensée ?
Telle une monographie d'un autre genre, le sémiospace permet aussi de présenter le travail de l'artiste Raphaële Bidault-Waddington en proposant un panorama de ses trois laboratoires de création : Laboratoire d'ingénierie d'idées, Petite industrie de l'image sensorielle, Raffinerie poétique.
« La conférence n'avait évoqué que superficiellement les origines de ce mot clandestin qu'est le sémiospace. Il appartient à une zone grise : ignoré des dictionnaires, il est toutefois usité par quelques chercheurs. L'anthropologue Lee Drummond y consacre un long chapitre de son livre American Dreamtime (1996), une analyse de films commerciaux américains au succès phénoménal comme Les Dents de la mer, James Bond ou Jurassic Park. L'auteur aborde ces films sous l'angle du mythe, qu'il définit comme un récit extraordinaire apportant des réponses à des questions essentielles. Contrairement à l'approche marxiste d'un auteur comme Roland Barthes qui débusque les mythes afin de montrer qu'il s'agit de créations de la bourgeoisie destinées à asseoir la domination de cette classe sur les masses, Drummond considère les mythes comme des savoirs en soi, des cadres de référence à l'intérieur desquels les êtres humains ont le loisir de développer des relations avec leurs semblables. Ce constat lui sert à formuler une théorie de la culture fondée sur les mythes qui prendrait la forme d'un “système vectoriel dynamique et complexe” qu'il appelle le sémiospace. Pour expliciter cette notion, il opère un détour par les créations linguistiques créoles, la physique quantique, les mathématiques fractales ou encore la théorie du chaos, qui convoquent l'idée d'une culture auto-générative et en constante transformation, fondée sur une série n de dimensions sémiotiques. »
Raphaële Bidault-Waddington (née en 1971, vit et travaille à Paris) est plasticienne, chercheuse et spécialiste de prospective. Elle expose ses compositions photographiques et diagrammes conceptuels, publie des textes littéraires, académiques ou critiques, et réalise des conférences comme des workshops collaboratifs expérimentaux. C'est sous le nom du LIID (Laboratoire d'Ingénierie d'Idées – liid.fr) qu'elle mène depuis 2000, en France et ailleurs, de vastes projets de recherche prospective et urbaine où elle s'aventure à imaginer le futur de l'art, de l'économie, de la ville comme de l'existence dans une ère devenue digitale.
Basé entre Paris et Genève, Sylvain Menétrey est le co-fondateur de la revue d'art Dorade. Il collabore à diverses revues dans les domaines de la mode, du design et de la culture, notamment Hemisphère, Le Temps à Genève et Double en France. Il est en outre correspondant en France pour l'Agence télégraphique suisse (ATS). Depuis septembre 2016, il codirige l'espace Forde (Genève) avec Nicolas Brulhart.