Anne Dressen parle de sa
pratique curatoriale (et plus largement du monde dans lequel cette pratique s'inscrit) ; Nick Mauss, avec qui la commissaire d'exposition échange régulièrement, intervient dans son texte, par insertions et en écho.
Au cours de série de conversations menées entre juin 2018 et février 2020, Anne Dressen et Nick Mauss échangent à propos de leur pratique curatoriale respective, notamment de leurs questionnements concernant les hiérarchies établies par l'institution muséale entre les arts, entre les arts dits majeurs et mineurs, le « grand » art et les arts décoratifs, art et non-art.
Anne Dressen a plusieurs fois mêlé « genres » dans les expositions dont elle a été la commissaire au Musée d'art moderne de Paris, avec Decorum. Tapis et tapisseries d'artistes en 2013, Medusa. Bijoux et tabous en 2017 et l'exposition Les Flammes - l'Age de la céramique, du 15 octobre 2021 au 6 février 2022, qui explore le domaine de la céramique dans ses dimensions autant décoratives, artisanales qu'artistiques, performatives et conceptuelles.
Nick Mauss a souvent mis en scène des expositions pluridisciplinaires pour lesquelles il crée des espaces transhistoriques, qui permettent de nouvelles associations, questionnements et qui représentent une part intrinsèque de son travail d'artiste. Certaines expositions, de la compilation-vinyle Crystal Flowers en 2012, à Transmission qui a eu lieu plus récemment en 2018 au Whitney Museum of American Art de New York, en passant par Bizarre Silks, Private Imaginings and Narrative Facts, etc. en 2020 à la Kunsthalle de Bâle, mettent en relation dissonante des figures marginalisées avec l'actualité, questionnant le statut de l'artiste, du spectateur, les codes de l'exposition et le rôle de l'historiographie.
Cette publication s'inscrit dans la collection
Before publication qui réunit les pré-publications de textes d'auteurs ou d'inserts d'artistes, en avant-première de leur édition définitive dans
L'Effet papillon II (deuxième tome de
L'Effet papillon, 1989-2007, catalogue du Centre d'édition contemporaine paru en 2008).
Anne Dressen (née en 1976 à Paris) est commissaire d'exposition à l'ARC (Animation-Recherche-Confrontation), le département contemporain du Musée d'art moderne de Paris. Ses expositions interrogent les pratiques artistiques officieuses ou périphériques au regard des beaux-arts, notamment autour du son et du clip vidéo, de la copie et de la reproduction, de l'artisanat et du décoratif, ou encore de la pornographie, en lien étroit avec les études culturelles, postcoloniales et de genre. Citons ainsi parmi ses expositions :
Off the Record (2004),
Playback (2007),
Sturtevant. The Razzle Dazzle of Thinking (2010),
Seconde main (2010),
La Demeure Joyeuse (2012),
Decorum. Tapis et tapisseries d'artistes (2013) – également présentée à la Power Station de Shanghai –,
La Passion selon Carol Rama (2014-2015) – une exposition itinérante conçue en collaboration avec le Musée d'art contemporain de Barcelone –,
Medusa. Bijoux et tabous (2017), ou encore
Trans (2019) au Frac Nouvelle-Aquitaine à Bordeaux.
Anne Dressen a enseigné l'histoire de l'art contemporain et de l'art vidéo à l'
École cantonale d'art de Lausanne (ECAL) entre 2011 et 2015 ainsi qu'à l'Art Center College of Design à Pasadena (Californie), en 2016. Ses essais et articles sont publiés dans des catalogues d'exposition, des livres d'artistes et des revues d'art tels qu'
Artforum International,
Frieze,
Frog,
Purple Magazine,
Pétunia,
Paris LA,
The Exhibitionist,
Flash Art International. En 2009, elle a obtenu la bourse de la Villa Medicis Hors les Murs pour une recherche autour de l'histoire et de la culture du faux dans la Chine ancienne et contemporaine. Elle fut nommée en 2014 par l'Independent Curators International (ICI) pour le Gerrit Lansing Independent Vision Curatorial Award.
L'artiste américain Nick Mauss (né en 1980 à New York) développe un travail pluridisciplinaire en partant du
dessin,, un médium qu'il juge modeste et propice à une expression directe de la pensée avant sa fixation. Il associe cet exercice de notation à la sculpture, à la performance, à l'écriture, à la poésie, voire au commissariat d'exposition. Mauss travaille à réhabiliter des sources historiques oubliées, qui fonctionnent comme des sous-textes de la production artistique contemporaine. Elles offrent par association une autre compréhension des œuvres exposées, une réévaluation des pratiques artistiques, du statut de l'artiste et des modes d'exposition. Dans cette perspective de recontextualisation, l'artiste s'est intéressé à des personnalités aussi diverses que Jochen Klein,
Madame Grès, Lorraine O'Grady, Reza Abdoh, Ian White,
Susan Cianciolo ou Hanne Darboven. Il a également contribué à plusieurs revues d'art contemporain dont
May,
Mousse Magazine,
Artforum International et
Texte zur Kunst. Parmi ses nombreuses expositions, citons sa participation à la 76e Biennale du Whitney (2012) et à
Designing Dreams: A Celebration of Léon Bakst au Nouveau Musée national de Monaco - Villa Sauber en 2016 pour laquelle il a réalisé la scénographie et le graphisme du catalogue. Pour
Nick Mauss: Transmissions au Whitney Museum of American Art en 2018, l'artiste a proposé un projet de recherche visant à recontextualiser les rôles de l'écrivain, critique et photographe Carl Van Vechten, du photographe de mode George Platt Lynes et de leurs contemporains qui ont contribué de manière essentielle à l'effervescence des avant-gardes dans le New York des années 1930-1950. Son installation mêlait plusieurs types d'archives : photographiques, du musée et celles que des danseurs incarnaient afin d'interroger leur ancrage historique et le rôle de l'artiste. En 2020, l'exposition
Bizarre Silks, Private Imaginings and Narrative Facts, etc. lui a été consacrée à la Kunsthalle de Bâle.